Nature - Ethique biocentrée

De Didaquest
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Les origines du mouvement

Mettre la nature au cœur des préoccupations, c’est bien là tout l’espoir du biocentrisme. Comprendre la nature comme une entité qui engloberait non seulement les êtres les plus microscopiques mais aussi les hommes et donner à chacun un droit équivalent. Ce paragraphe mettra en avant l’apparition de ce mouvement, d’où est-il venu et qui l’a développé seront les questions auxquelles nous essayerons de répondre. Terme apparu dans les années 70 au moment de la prise de conscience mondiale des problèmes environnementaux subis par notre planète, le mouvement biocentriste est issu d’une réflexion plus profonde menée par nombre de philosophes. Attachés au courant de l'éthique environnementale Tom Regan et Paul Taylor (1982) peuvent être considérés comme les tenants de ce mouvement qui fut introduit en France par Catherine Larrère (1992,1997,1999).

Un concept associé à la Deep Ecology

La Deep ecology (écologie profonde) est largement lié au concept de biocentrisme, mouvement radicale qui considère l’humanité comme étant une partie intégrante de l’écosystème planétaire. La Deep Ecology a été fondée et largement développée par Arne Naess, philosophe Norvégien qui s’est éteint début 2009. C’est en 1972 qu’il crée le terme qui apparaitra dans un article fondateur publié pour la première fois en 1973 : « Le mouvement écologique superficiel et le mouvement profond ». Il y rejette l'idée que les êtres vivants puissent être classés en fonction de leurs valeurs respectives. Cette totale rupture avec l’ « anthropocentrisme aux effets négatifs sur la qualité des humains eux mêmes oppose l’idée d’une écologie profonde centrée sur les être vivants { l’idée d’une écologie superficielle centrée sur les individus et leur bien-être. Arne Næss avait ainsi forgé le concept de la Deep Ecology en s'appuyant notamment sur l'idée que : «La richesse et la diversité des formes de vie sont des valeurs en elles-mêmes et contribuent à l'épanouissement de la vie humaine et non humaine sur Terre.» Il ré-inscrit les finalités humaines dans une perspective plus large, celle du vivant, afin de prendre en compte les besoins de l'ensemble de la biosphère, notamment des espèces avec lesquelles l’homme co-évolue depuis des millions d'années. Philosophe et professeur, il ne se contenta pas d’inventer un concept mais défendit aussi ses propres convictions en manifestant auprès d’associations de défense de l’environnement en s’enchaînant par exemple avec 300 autres participants pour empêcher la construction d’un barrage en 1970 au nord de la Norvège. Le concept de Deep Ecology a été influencé par d’autres mouvances qu’il convient ici de citer. Tout d’abord Lynn White Jr qui dans son essai «  The historical roots of our ecological crisis » expose les origines du problème relationnel de l’homme avec la nature et de tout individu qui fait subir des changements à son environnement. Ce texte explique aussi en quoi les pays occidentaux ont les religions les plus anthropocentrées du monde : « Christianity, in absolute contrast to ancient paganism and Asia's religions, not only established a dualism of man and nature but also insisted that it is God's will that man exploit nature for his proper ends ». Le Christianisme en contraste total avec le paganisme et les religions asiatiques, n’a pas seulement établit un dualisme opposant homme et nature mais a aussi insisté sur le fait que c’est la volonté de Dieu que l’homme exploite la nature { ses propres fins.

Enfin, il semble nécessaire de conclure ce paragraphe en énonçant les 8 principes fondateurs de la Deep Ecology qui ont aidé à l’élaboration du concept de biocentrisme. Il s’agit pour les défenseurs de ce mouvement de comprendre la Terre comme un système global supérieur à chaque partie qui le compose (l’humanité étant une de ces parties). Ce système n’est alors pas une ressource exploitable { l’infini par l’homme.

Les fondements de la Deep Ecology

  • Le bien-être et l'épanouissement des formes de vie humaines et non-humaines de la Terre ont une valeur en elle-même (synonyme : valeur intrinsèque, valeur inhérente). Ces valeurs sont indépendantes de l'utilité du monde non-humain pour les besoins humains.
  • La richesse et la diversité des formes de vie contribuent à la réalisation de ces valeurs et sont également des valeurs elles-mêmes. L'Homme n'a pas le droit de réduire la richesse et la diversité biologique, sauf pour satisfaire des besoins humains vitaux.
  • L'épanouissement de la vie et des cultures humaines n'est compatible qu'avec une décroissance substantielle de la population humaine. Le développement des formes de vie non-humaines requiert une telle diminution.
  • L'interférence humaine actuelle avec le monde non-humain est excessive et nuisible, et la situation empire rapidement.
  • Des politiques doivent donc être changées. Ces politiques affectent les structures économiques, technologiques, et idéologiques fondamentales. Il en résultera une société profondément différente de la nôtre.
  • Les changements idéologiques passent par l'appréciation d'une bonne qualité de vie plutôt que l'adhésion à des standards de vie toujours plus élevés. Il faut prendre conscience de la différence entre "bonne qualité" et "course à un niveau de vie extrêmement élevé" (qui serait néfaste à la nature).
  • Ceux qui souscrivent aux points précédents s'engagent à essayer de mettre en application directement ou indirectement les changements nécessaires.

La nouvelle encyclopédie de bioéthique

Pour les auteurs de la « Nouvelle encyclopédie de Bioéthique », « le terme biocentrisme désigne les théories selon lesquelles les frontières de la communauté morale doivent être élargies jusqu’à englober tous les êtres vivants, quels qu’ils soient. Il ne leur est évidemment pas demandé de se comporter comme des agents moraux mais on estime au moins qu’ils doivent bénéficier de restrictions normatives, par opposition à des restrictions simplement prudentielles pesant sur la conduite des agents moraux. » Les auteurs distinguent dans le livre deux formes du biocentrisme. La première serait pour eux une forme non technique qui « voit dans la vie comme telle un très grand bien, peut-être même le bien suprême et, en conséquence, valorise les êtres vivants qui sont des manifestations de cette vie. » La seconde forme, plus technique, est une théorie contemporaine en éthique environnementale, « elle est destinée à dépasser le zoocentrisme6 et à remédier aux faiblesses supposées de celui-ci.» Les bibliothèques regorgent maintenant d’expériences, de reportages, de films catastrophes qui nous ont paru un support intéressant pour mener ce dossier. Ici se trouve un échantillon (non exhaustif) des œuvres qui nous ont sensibilisées, les questions qui y sont soulevées étant généralement nombreuses. Sauver l’homme en protégeant la nature pour qu’il s’en serve et donc, aider l’humanité à se développer, oui, mais au détriment de quoi ? Perte de biodiversité, développement de marchés parallèles, de mafias, et finalement diminution de ressources nécessaires à la survie de l’homme… Protéger la nature, la mettre sous cloche et n’autoriser aucun prélèvement quel qu’il soit au détriment de peuplades dépendantes de ressources spécifiques. Et finalement, sauver l’homme lui-même en le parquant dans des « réserves » ?