Les idées sont strictement localisées dans une seule région du cerveau serait une simplification excessive.

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Introduction Histoire des neurosciences

Dès le début du XIXè siècle, un intérêt croissant est apparu concernant l’étude des localisations cérébrales des fonctions cognitives dans le cerveau. Deux conceptions s’opposent : une première vue, prônée par Franz Joseph Gall, affirme que le cerveau est composé de parties spécialisées et que les aspects de la perception, de l’émotion ou du langage sont localisés dans divers systèmes neuronaux anatomiquement distincts. A la même époque, Jean-Pierre-Marie Flourens défend une position diamétralement opposée, postulant que les fonctions cognitives sont des propriétés globales existant grâce à l’activation intégrée du cerveau entier. Flourens a développé pour ce faire l’idée d’« aggregate fields », champs reprenant l’ensemble des zones cérébrales impliquées pour une même fonction. L’approche phrénologique proposée par Gall, également appelée « localisationniste », sera à l’origine de la psychologie expérimentale, fin du XIXè

siècle. Initialement, ses fondateurs, Gustav Fechner et Wihlelm Wundt se sont

centrés sur l’étude des mécanismes psychophysiques, c’est-à-dire l’analyse des relations quantitatives pouvant exister entre les stimuli physiques et les sensations subjectives. Le succès important de leur démarche a encouragé les psychologues à étudier des comportements plus complexes à partir d’une approche rigoureuse : le behaviorisme. Fondé par Watson, suivi par Skinner, le behaviorisme postule que la psychologie ne peut être approchée que par l’étude des stimuli observables et des réponses engendrées, et non par les processus non-observables qui interviennent entre le stimulus et la réponse. Cette approche a permis la mise en évidence de résultats intéressants sur les principes généraux du comportement et de l’apprentissage.

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4 Néanmoins, dans les années 1960, les limites du behaviorisme favorisent l’émergence d’une nouvelle approche qui s’intéressera, cette fois, aux processus cognitifs et aux représentations internes mis en jeu pour élaborer la réponse à partir du stimulus. Cette approche, la psychologie cognitive, va cibler plus précisément certains aspects de la cognition et plus généralement, de la vie mentale. La cognition regroupe l’ensemble des activités qui découlent du fonctionnement cérébral chez l’homme et chez l’animal : sensori-motricité, perception, langage, apprentissage, mémoire, représentation des connaissances, décision et raisonnement. L’étude de la cognition ne peut toutefois pas être étudiée par une seule discipline. Elle implique nécessairement une interaction forte entre divers domaines de recherche qui ont pourtant longtemps été considérés comme relativement séparés. Les scientifiques actuels distinguent entre autre l’intelligence artificielle, la linguistique, la modélisation mathématique, les neurosciences et la psychologie cognitive, regroupés sous le terme de « sciences cognitives » (Tiberghien, 2002). Chacune de ces disciplines a développé son propre champ de compétence et ses propres modèles. Les études actuelles tentent maintenant d’intégrer ces différents champs et de réunir les apports de chacun d’eux afin d’unifier des domaines finalement moins distincts que présupposé. Notamment, les neurosciences associées à la psychologie et l’informatique vont permettre d’accroître considérablement les connaissances dans un domaine fondamental de la psychologie : la neuropsychologie. Celle-ci a été définie par Hécaen (1972) comme la « discipline qui traite des fonctions mentales supérieures dans leurs rapports avec les structures cérébrales ». La neuropsychologie moderne tente de développer les connaissances fonctionnelles et neuroanatomiques du cerveau.

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Il est traditionnellement acquis que la naissance de la neuropsychologie apparaît suite aux travaux de Broca et de Wernicke au milieu de XIXè

siècle. Par des

observations anatomocliniques, ces deux neurologues ont établi un lien précis entre les fonctions cognitives atteintes et les zones cérébrales lésées (la zone frontale inférieure gauche soutenant la production langagière pour Broca, et la zone temporale supérieure gauche, la compréhension du langage oral pour Wernicke). Suite à ces études princeps, la neuropsychologie se développera par l’étude de patients cérébrolésés adultes, en vue d’établir des liaisons entre structures cérébrales et processus cognitifs. Cette démarche est d’ailleurs largement inspirée du courant phrénologique prôné par Gall et Purzheim. La neuropsychologie souffrira toutefois du fait que les études corrélationnelles entre les atteintes cérébrales et cognitives ne puissent se dérouler que post-mortem, avec tous les problèmes de validité expérimentale que cela entraîne. Le développement des technologies informatiques récentes va alors résoudre ce problème. En effet, la découverte de techniques d’imagerie va permettre l’investigation in vivo de la partie anatomique et fonctionnelle de l’activité mentale : le cerveau. L’imagerie fonctionnelle, selon Dehaene (1997), deviendra alors le principal outil des neurosciences cognitives et de la neuropsychologie, et va « jeter un regard neuf sur des questions de psychologie et de neuropsychologie demeurées en suspens ». Cette avancée fondamentale dans la compréhension de l’être humain sert aujourd’hui de fondement à l’analyse du lien entre les diverses fonctions cognitives et leurs substrats anatomiques. En corollaire du développement de l’informatique, une autre discipline va également permettre l’essor de la neuropsychologie : les neurosciences. Celles-ci vont permettre de mieux comprendre l’aspect neurobiologique de la physiologie cérébrale. Les premières études cellulaires du système nerveux, remontent aux années 50, et vont prouver combien les neurosciences peuvent apporter à la psychologie et inversement. Les neuroscientifiques vont en effet récupérer les méthodes expérimentales rigoureuses du behaviorisme et les appliquer à l’approche

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cellulaire pour analyser les stimuli sensoriels résultant de réponses neuronales, et mettre ainsi en évidence les supports biologiques des fonctions cognitives. Cette technique va permettre d’étudier le comportement et la cognition en passant de la description à l’exploration des mécanismes sous-tendant les représentations internes du monde externe. Les premières études en neurosciences ont été publiées par Mountcastle (1957). Cet auteur va utiliser des approches cellulaires pour analyser les processus sensoriels dans le cortex cérébral de chats. Son travail représente une avancée aussi considérable dans la compréhension de l’organisation du cerveau que la découverte des neurones par Ramon y Cajal (1894). Mountcastle observe, au travers de techniques physiologiques cellulaires, que le cerveau filtre et transforme l’information sensorielle dans le cortex, et que ces transformations sont le fondement de la perception. Les systèmes sensoriels analysent, décomposent, et ensuite restructurent les informations sensorielles brutes selon certaines règles et selon certaines connexions. Mountcastle va démontrer notamment que certaines cellules nerveuses spécifiques dans le cortex primaire répondent à des stimuli particuliers, certaines répondant à un toucher superficiel, d’autres à une pression plus intense, parfois même aux deux. Il constate que les différents types de cellules sont isolés en colonnes verticales et comprennent des centaines de neurones qui s’étendent de la surface corticale à la matière blanche située en dessous. Mountcastle affirme alors que chaque colonne sert d’unité intégrative, qu’elle compose un module logique, et que ces colonnes sont le mode élémentaire de l’organisation corticale. Alors que les études de cellules uniques ont énormément apporté à la compréhension du fonctionnement anatomique cérébral, le développement technologique va permettre de s’intéresser à l’aspect fonctionnel du cerveau, par l’étude des divers réseaux et des nombreux neurones s’activant de concert. Il est en effet établi aujourd’hui que les neurones, en des points distincts des zones corticales, peuvent travailler ensemble en tant qu’unités fonctionnelles (Pulvermüller, 1999).

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Pour mesurer l’activité de larges populations de neurones, deux grandes approches sont communément utilisées. La première, à l’aide de dispositifs d’électrodes, va étudier l’activité électrique du cortex. La seconde, permettant de scanner le cerveau dans sa globalité, se base sur l’étude de la modification du débit sanguin cérébral consécutif à l’activité neuronale. Ces approches sont encore complétées par l’étude de patients cérébrolésés et par des méthodes moléculaires, tels que la délivrance de marqueurs ou d’autres molécules à des neurones spécifiques. Les deux grands thèmes actuels des neurosciences sont l’activation du cerveau et la neuroplasticité. Le premier s’intéresse à la manière dont les communications se développent entre cellules, comment ces cellules fonctionnent et échangent. La plasticité caractérise le fait que le système nerveux peut s’adapter ou changer selon les événements vécus durant la vie. L’expérience peut ainsi modifier l’activation du système nerveux. En effet, les connexions entre neurones ne sont pas fixes mais modifiables. Ainsi, des études chez les invertébrés ont montré que des formes simples d’apprentissages, comme l’habituation, la sensibilisation ou le conditionnement classique, résultent de changements fonctionnels et structurels entre neurones. L’intérêt croissant pour ce carrefour de la biologie et de la psychologie que forment les neurosciences, soutenu par les apports de l’informatique, amènera encore sûrement de nombreuses découvertes primordiales dans la compréhension du système cérébral humain.

Eléments de Neuroanatomie

Chapitre I : Eléments de Neuroanatomie Ce chapitre aborde les aspects neurophysiologiques du cerveau : les parcellisations corticales et sous-corticales, ainsi que la principale carte cytoarchitectonique utilisée par les neuropsychologues, celle de Brodmann (1909). Le système nerveux humain contient environ 300 milliards de cellules, classées en deux catégories : les cellules gliales et les neurones. Les cellules gliales (appelées également neurogliales ou glies) sont des cellules présentes dans le cerveau, environ 10 fois plus nombreuses que les neurones. Elles se retrouvent aussi bien dans le système nerveux central que périphérique. Les types de cellules gliales sont différents selon le système. Il est fréquent de distinguer trois types de cellules : les astrocytes, les oligodendrocytes et les microglies : - L’astrocyte est une large cellule en rapport direct avec la vascularisation du cerveau. Elle est en contact fréquent avec les vaisseaux sanguins à des endroits spécifiques appelés « end-feet » (les points de connexions). Cela permet à l’astrocyte de transporter des ions à travers les parois vasculaires et de créer entre les tissus du système nerveux central et le sang une barrière appelée la « Bloodbrain barrier ». Elle protège le système nerveux central des divers composants sanguins, notamment chimiques, susceptibles d’affecter l’activité neuronale (e.g. des drogues ou des agents neuroactifs comme la dopamine). Elle explique également la non applicabilité de certains traitements contre la maladie de Parkinson (le parkinsonien a un déficit de dopamine dans les ganglions de la base) car injecter de la dopamine dans le sang ne pourrait atteindre les cellules nerveuses ; - l’oligodendrocyte, présente dans le système nerveux central, est à la base de la myélinisation des axones. Dans le système périphérique, elle est appelée « cellule de Schwann » ; - enfin, la microglie, plus petite, joue un rôle quand des tissus sont endommagés. Elle est surtout présente dans des zones cérébrales endommagées et joue un rôle phagocytaire : elle supprime les cellules détruites (Godaux, 1990).

Eléments de Neuroanatomie

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