Différences entre versions de « Scientisme »

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Le '''scientisme''' est un [[idéologie|point de vue]] apparu au XVIIIe siècle selon lequel la [[connaissance]] scientifique permettrait d'échapper à l'[[ignorance]] dans tous les domaines et donc, selon la formule d'[[Ernest Renan]] ([[1823]]-[[1892]]) d'« organiser scientifiquement l'[[humanité]] ». Il s'agit donc d'une foi dans l'application des [[principe]]s de la [[science]] dans tous les domaines. Dans cette perspective, le [[politique]] s'efface devant la gestion « ''scientifique'' » des problèmes sociaux et toute querelle ne peut dès lors que relever de l'ignorance, de l'idéologie, ou d'une volonté de nuire : il existerait une « bonne solution » qui s'imposerait universellement sans que la volonté, les desiderata ou la subjectivité d'un décideur n'aient à intervenir.  
  
 
Le scientisme accorde une grande importance à l'[[éducation]] qui, en [[liberté|libérant]] le plus grand nombre des illusions [[métaphysique]] et [[Théologie|théologique]], rend possible une gestion prétendument [[Raison|rationnelle]] de la [[Société (sciences sociales)|société]]. Pour les scientistes les plus [[Radicalisme|radicaux]], le [[pouvoir politique]] doit être confié à des [[savant]]s et non à des [[bureaucrate]]s. À la limite, cette conception débouche sur la négation de la [[démocratie]] : une solution « ''scientifique'' » élaborée par des experts compétents n'a pas à être discutée. Cette perspective enthousiasma [[Ernest Renan|Renan]], mais inquiéta plus tard sérieusement [[Georges Bernanos|Bernanos]] (''[[La France contre les robots]]'').
 
Le scientisme accorde une grande importance à l'[[éducation]] qui, en [[liberté|libérant]] le plus grand nombre des illusions [[métaphysique]] et [[Théologie|théologique]], rend possible une gestion prétendument [[Raison|rationnelle]] de la [[Société (sciences sociales)|société]]. Pour les scientistes les plus [[Radicalisme|radicaux]], le [[pouvoir politique]] doit être confié à des [[savant]]s et non à des [[bureaucrate]]s. À la limite, cette conception débouche sur la négation de la [[démocratie]] : une solution « ''scientifique'' » élaborée par des experts compétents n'a pas à être discutée. Cette perspective enthousiasma [[Ernest Renan|Renan]], mais inquiéta plus tard sérieusement [[Georges Bernanos|Bernanos]] (''[[La France contre les robots]]'').

Version du 11 février 2009 à 16:42

Le scientisme est un point de vue apparu au XVIIIe siècle selon lequel la connaissance scientifique permettrait d'échapper à l'ignorance dans tous les domaines et donc, selon la formule d'Ernest Renan (1823-1892) d'« organiser scientifiquement l'humanité ». Il s'agit donc d'une foi dans l'application des principes de la science dans tous les domaines. Dans cette perspective, le politique s'efface devant la gestion « scientifique » des problèmes sociaux et toute querelle ne peut dès lors que relever de l'ignorance, de l'idéologie, ou d'une volonté de nuire : il existerait une « bonne solution » qui s'imposerait universellement sans que la volonté, les desiderata ou la subjectivité d'un décideur n'aient à intervenir.

Le scientisme accorde une grande importance à l'éducation qui, en libérant le plus grand nombre des illusions métaphysique et théologique, rend possible une gestion prétendument rationnelle de la société. Pour les scientistes les plus radicaux, le pouvoir politique doit être confié à des savants et non à des bureaucrates. À la limite, cette conception débouche sur la négation de la démocratie : une solution « scientifique » élaborée par des experts compétents n'a pas à être discutée. Cette perspective enthousiasma Renan, mais inquiéta plus tard sérieusement Bernanos (La France contre les robots).

Description

Le scientisme renvoie à trois idées[1] :

  • l'idée que la science pourrait se substituer à la philosophie ou à la métaphysique dans la recherche de solutions aux grands problèmes éthiques ou moraux,
  • l'idée que la science porterait en elle toutes les solutions aux souffrances de l'humanité,
  • l'idée que les méthodes des sciences exactes seraient les seules vraies méthodes scientifiques, et qu'il conviendrait de les appliquer y compris aux sciences humaines et sociales.

A ces trois acceptions il est possible d'ajouter celle de Popper, qui considère qu'est scientiste[2] celui qui, ne comprenant pas vraiment les méthodes des sciences exactes, en fait un usage naïf en science humaine ou sociale.

Sous des acceptions moins techniques, le scientisme peut être associé à l'idée que seules les connaissances scientifiquement établies sont vraies, ou renvoyer à l'idée d'un certain excès de confiance en la science qui se transformerait en dogme.

Le scientisme ne doit pas être confondu avec le réalisme métaphysique, qui soutient que le monde est connaissable.

Citation d'Anatole France, L'hypnotisme dans la littérature : « Si la science un jour règne seule, les hommes crédules n'auront plus que des crédulités scientifiques. »

Critiques

Libérale

Friedrich Hayek, dans The Counter-Revolution of Science (rédigé entre 1940 et 1951, publié sous forme de livre en 1952), Karl Popper avec Misère de l'historicisme ou La société ouverte et ses ennemis, ou encore Michaël Polanyi et La Logique de la liberté (1951), ont opposé trois critiques congruentes du scientisme, que mettaient en acte les ingénieurs sociaux d'URSS ou d'ailleurs, en montrant les dérives politiques (notamment, pour le premier, dans La Route de la servitude, 1944). Si la science est une et la vérité accessible aux hommes (ou à une élite qui se charge de la représenter) alors le chemin que doit suivre la société une et indivisible ne doit souffrir aucune contestation : le scientisme mènerait nécessairement au collectivisme. Propagande/éducation, torture/rééducation, épuration des contestataires/punition des comploteurs obscurantistes et vendus, seront alors les bras armés de la science bienveillante, le régime étant mené à une politisation ultime de chaque sphère de l'existence, dont les effets délétères sur toute activité rationnelle ne tardent pas à se faire sentir : « Présenter la théorie de la relativité comme « une attaque sémite contre les bases de la physique chrétienne et nordique » ou la contester parce qu’elle se trouve « en conflit avec le matérialisme dialectique et le dogme marxiste », revient au même. Repousser certains théorèmes de mathématique statistique en prétendant « qu’ils participent à la lutte des classes sur la frontière idéologique et qu’ils sont le produit du rôle historique des mathématiques au service de la bourgeoisie » [doctrines du marxisme scientifique] ou condamner cette discipline dans son ensemble « parce qu’il n’est pas suffisamment garanti qu’elle sert les intérêts du peuple », voilà qui revient à peu près au même. Les mathématiques pures ne sont pas mieux traitées et il parait qu’on peut attribuer certaines conceptions de la continuité « aux préjugés bourgeois ». Selon les Webb, la Revue des Sciences Naturelles Marxistes-Léninistes se réclame des principes suivants : « Nous représentons le parti dans les mathématiques. Nous combattons pour la pureté de la théorie marxiste-léniniste en chirurgie ». Nous ne saurions traiter ces aberrations, si incroyables qu’elles paraissent, comme de simples accidents (...): elles dérivent du même désir de voir diriger [par une élite éclairée par la science] chaque chose par « une conception d’ensemble du tout ». (La Route de la servitude, PUF, p.117-118.)

Notes et références

  1. Voir l'entrée "scientisme" de R. Nadeau, Vocabulaire technique et analytique de l'épistémologie, PUF, 1999
  2. Attention au faux-ami partiel : le nom commun anglais scientist peut signifier à la fois scientifique ou scientiste.

Annexes

Articles connexes

Liens externes