Différences entre versions de « Uniformitarisme - Catastrophisme »
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+ | * Le catastrophisme est une théorie scientifique qui tente de construire rationnellement les croyances sur l'origine du monde et sur l'évolution des espèces en mettant en avant l'impact qu'auraient eu des catastrophes de courte durée, violentes et inhabituelles. Un nom pour ce type de théorie est apparue au XIXe siècle, lorsqu'est apparu l'uniformitarisme, théorie qui, quant à elle, postule que les processus qui se sont exercés dans un passé lointain s'exercent encore de nos jours. | ||
- Le Déluge est l’histoire d’une inondation supposée universelle. Celui-ci est connu de nous sous plusieurs versions. La question fondamentale ici était toujours : quel avait été le mécanisme ? | - Le Déluge est l’histoire d’une inondation supposée universelle. Celui-ci est connu de nous sous plusieurs versions. La question fondamentale ici était toujours : quel avait été le mécanisme ? | ||
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du Déluge biblique a joué un rôle principal dans l’explication de l’origine de la topographie actuelle et dans le développement de la stratigraphie. Étonnamment, ce rôle est devenu beaucoup plus important depuis la Renaissance à cause de la plus grande accessibilité de la Sainte Écriture au grand public après la Réforme. | du Déluge biblique a joué un rôle principal dans l’explication de l’origine de la topographie actuelle et dans le développement de la stratigraphie. Étonnamment, ce rôle est devenu beaucoup plus important depuis la Renaissance à cause de la plus grande accessibilité de la Sainte Écriture au grand public après la Réforme. | ||
− | {{Une idée de l'uniformitarisme à l'Antiquité: Cas de la Tectonique}} | + | == {{Une idée de l'uniformitarisme à l'Antiquité: Cas de la Tectonique}} == |
− | Dans le cadre de la définition de la science donnée par Popper, les hypothèses développées par les penseurs grecs de la Grèce continentale, d’Ionie et d’Italie méridionale à partir du 6e siècle av. J.-C., ont été strictement scientifiques. Cette manière de penser a été introduite par deux hommes de la ville de Milet en Ionie (Turquie du sud-est) : Thalès (floruit ca. 575 av. J.-C.) et Anaximandre (floruit ca. 560 av. J.-C.). Thalès a été le premier homme à avoir formulé son savoir en généralisations théoriques qui sont testables par observation. Après avoir développé quelques théorèmes géométriques, Thalès a proposé d’approcher les problèmes de la nature avec la même méthode de généralisation. Il a rationalisé le concept sumérien de « tarkullu » dans le cadre de son hypothèse d’un disque terrestre flottant sur les eaux de l’océan. La différence énorme et vitale entre le concept de « tarkullu » et l’hypothèse de Thalès est ce que le premier a été un concept mythologiqe intouchable ; par contre, le second a pris la forme d’une hypothèse scientifique, offerte libéralement à la critique. Anaximandre, ami et élève (ou seulement auditeur) de Thalès d’après la tradition doxographique, a relevé le défi et répondu comme suit : « ...la terre est suspendue, soutenue par rien, mais stable à cause de son égal éloignement de tout. Sa forme est courbée, arrondie à la façon d’une colonne de pierre ; sur l’une nous marchons, mais l’autre se trouve à l’opposé. » (Hyppolite, Refutatio : traduction de Marcel Conche, 1991). Il croyait que nous vivions sur une surface plate de ce cylindre. C’est pourquoi il pensait que ce serait utile de dessiner une carte de cette surface : « Anaximandre le Milésien, auditeur de Thalès, le premier eut l’audace d’inscrire la terre habitée sur une tablette. Après lui, Hécatée le Milésien, grand voyageur, rendit la carte plus précise, si bien qu’elle devint un objet d’admiration. » (Agathémère, Géographie, traduit par Marcel Conche, 1991). Nous savons aussi, à partir des témoignages des auteurs classiques après lui, qu’il a disserté dans son ouvrage intitulé Peri fiseos (Sur la nature) sur les mouvements du niveau de la mer et probablement sur les tremblements de terre. Son interprétation des ces phénomènes, à laquelle l’hypothèse ultérieure de Benoît de Maillet (Telliamed, 1748) ressemble, a été entièrement exogénique. On accuse très souvent les Grecs de ne pas avoir eu une conception linéaire du temps. Pourtant, on peut voir dans le livre d’Anaximandre, qu’il avait une conception linéaire (et infinie !) du temps, dans laquelle il a même pu formuler une théorie du développement de la vie. Une importante implication tirée par Anaximandre de sa théorie historique de la terre concerne les tremblements de terre : Cicéron (dans son Sur la Divination) témoigne de la prédiction, par Anaximandre, d’un tremblement de terre à Sparte (Marcel Conche, 1991). Nous est parvenu le modèle des tremblements de terre d’Anaximène (floruit ca. 546 av. J.-C.), élève d’Anaximandre, selon lequel la terre s’ébranle à cause du dessèchement progressif, avec pour conséquence le croulement de la terre. Il est tout à fait possible que ce modèle ait été celui d’Anaximandre. Il est aussi très probable que ce modèle a été le fondement de l’hypothèse, dite « éponge », de la structure de la terre d’Empédocle (floruit ca. 450 av. J.-C.). Aristote, dans son De Caelo avait écrit que les philosophes pythagoriciens d’Italie n’avaient pas placé la terre au centre de l’univers mais un feu central. Ultérieurement, Simplicius l’a critiqué en disant que les mieux informés pensent que le feu se trouve au centre de la terre et pas au centre du Cosmos ! En se basant sur l’observation du volcanisme et de l’aspect perforé de la terre en Italie méridionale (et, peut-être dans d’autres régions méditerranéennes alors connues), Empédocle a devéloppé (ou amélioré) l’idée d’un feu interne qui réside dans les canaux à l’intérieur de la terre. Maintenant la question qui se présente à nous est : qu’est ce qu’Empédocle a imaginé sur les effets du feu souterrain ? D’abord, il croyait que les pierres se forment sous l’action du feu. Empédocle pensait aussi que les irrégularités de la surface de la terre doivent leur existence au feu interne de la terre. Il est donc devenu le fondateur d’une dynamique interne de la terre indépendante du Soleil : « Empédocle pense que ces falaises, ces rocs et ces pierres qui s’offrent à notre vue, se dressent et surgissent grâce au feu qui brûle dans les profondeurs de la terre et qui les a projetés au dehors. » (Plutarque, De primo frigido, traduit par Jean Bollack, 1969). Ces idées d’Empédocle sur les rouages de notre planète ont eu une influence décisive sur les interprétations de la tectonique de la terre jusqu’à la fin du 18e siècle ! Au temps de la mort de Socrate (399 av. J.-C.), l’idée que la chaleur intérieure de la terre est responsable des mouvements de l’écorce terrestre a été bien respectée à Athène. Le meilleur témoignage des vues sur la tectonique de Platon (428/7-348/7 av. J.-C.), élève de Socrate, nous le trouvons dans le dialogue Phédon (395-382 av. J.-C.). Là nous avons une théorie générale sur la structure et le comportement structural de la terre qui est très empédoclienne. Pourtant il n’est pas toujours facile d’interpréter les descriptions de Platon dans le cadre d’une image visuelle. Mais la première théorie de la tectonique globale proprement dite a été celle d’Aristote (384-322 av. J.-C.) développée à Assos dans un cadre de la géophysique platonienne. Pierre Duhem nous a montré que Théophraste (372/369-288-285 av. J.-C.), comme son maître et ami Aristote avant lui, et comme James Hutton, l’un des fondateurs de la géologie moderne pendant le 18e siècle, niait qu’on pût découvrir des preuves que le monde a commencé et qu’il doit avoir une fin. Théophraste a répondu contre les argumentations de Zénon, qui niait l’éternité (ou incorruptibilité) du monde. L’argumentation de Théophraste montre une excellente compréhension de la force des eaux dans la dégradation de la topographie. Dans sa réponse, il souligne aussi l’existence des facteurs internes qui doivent former la topographie de la terre. C’est précisément la même forme d’argumentation qu’utilisera Hutton, deux millénaires plus tard ! La question de l’origine de montagnes s’est présentée à Ératosthène (274-194 av. J.-C.) quant à l’origine du Mont Taurus. D’après les discussions dans la Géographie de Strabon, nous savons qu’« après avoir dit que la terre dans son ensemble est de forme sphérique, non pas comme un objet fait au tour, mais avec quelques irrégularités » Ératosthène « décrit l’une après l’autre toutes les modifications qui interviennent du fait de l’eau, du feu, des tremblements de terre, des éruptions volcaniques et autres phénomènes du même genre ». Il « vante alors l’opinion de Straton le Physicien et aussi celle de Xanthos de Lydie. D’après Xanthos, il se produisit sous Artaxerxès [roi achéménide de Perse, 464-424 av. J.-C.] une grande sécheresse qui eut pour conséquence de tarir fleuves, lacs et puits ; sachant, par ailleurs qu’en plusieurs endroits, situés à bonne distance de la mer, on trouvait des pétrifications en forme de coquillages ou de pétoncles, des empreintes de valves et de l’eau saumâtre, notamment en Arménie, en Matiène et en basse Phrygie, il en tirait la conviction que ces plaines avaient jadis été occupées par la mer » (Strabon, I, 3. 3, traduction de Germaine Aujac). Les idées tectoniques de Strabon (Amasya) (64/63 av. J.-C.-23/25 AD) sont en principe les mêmes que celles d’Ératosthène. Il décrit les tremblements de terre, les sources chaudes, l’activité volcanique actuelle et du passé, et les changements topographiques associés. Les produits volcaniques ici (les fumerolles) sont décrits par Strabon aussi comme le « plutonium » (Strabon, V. 4. 5). Strabon a expliqué les courants du Bosphore et des Dardanelles avec l’hypothèse d’un soulèvement du fond de la Mer Noire (Pontus Euxinus). Après avoir rejeté la possibilité des changements permanents du niveau de la mer à cause d’une augmentation du volume de l’eau, Strabon explique son mécanisme pour les changements du niveau du sol de la mer qui est entièrement aristotélicien. Avec Strabon nous sommes donc revenus au modèle d’Aristote ! Pourquoi le Mont Taurus était-il conçu de façon tellement linéaire par les deux grands géographes de l’Antiquité ? Leur grand successeur Alexandre de Humboldt (1769-1859) nous fournit la réponse : « On se demande d’où les Grecs ont pu tirer une notion en partie très exacte sur la direction continue d’une haute chaîne de montagnes suivant dans sa direction un même parallèle bien au-delà des sources du Gange ? Cette opinion était-elle purement hypothétique et fondée sur une certaine prédilection pour la régularité des formes ? » (de Humboldt, Asie Centrale, 1843, t. I, pp.132-133). Nous savons que l’apogée de la géographie antique, Claude Ptolémée d’Alexandrie (90-168 AD), a travaillé dans la même tradition de régularisme. | + | |
+ | * Dans le cadre de la définition de la science donnée par Popper, les hypothèses développées par les penseurs grecs de la Grèce continentale, d’Ionie et d’Italie méridionale à partir du 6e siècle av. J.-C., ont été strictement scientifiques. Cette manière de penser a été introduite par deux hommes de la ville de Milet en Ionie (Turquie du sud-est) : Thalès (floruit ca. 575 av. J.-C.) et Anaximandre (floruit ca. 560 av. J.-C.). Thalès a été le premier homme à avoir formulé son savoir en généralisations théoriques qui sont testables par observation. Après avoir développé quelques théorèmes géométriques, Thalès a proposé d’approcher les problèmes de la nature avec la même méthode de généralisation. Il a rationalisé le concept sumérien de « tarkullu » dans le cadre de son hypothèse d’un disque terrestre flottant sur les eaux de l’océan. La différence énorme et vitale entre le concept de « tarkullu » et l’hypothèse de Thalès est ce que le premier a été un concept mythologiqe intouchable ; par contre, le second a pris la forme d’une hypothèse scientifique, offerte libéralement à la critique. Anaximandre, ami et élève (ou seulement auditeur) de Thalès d’après la tradition doxographique, a relevé le défi et répondu comme suit : « ...la terre est suspendue, soutenue par rien, mais stable à cause de son égal éloignement de tout. Sa forme est courbée, arrondie à la façon d’une colonne de pierre ; sur l’une nous marchons, mais l’autre se trouve à l’opposé. » (Hyppolite, Refutatio : traduction de Marcel Conche, 1991). Il croyait que nous vivions sur une surface plate de ce cylindre. C’est pourquoi il pensait que ce serait utile de dessiner une carte de cette surface : « Anaximandre le Milésien, auditeur de Thalès, le premier eut l’audace d’inscrire la terre habitée sur une tablette. Après lui, Hécatée le Milésien, grand voyageur, rendit la carte plus précise, si bien qu’elle devint un objet d’admiration. » (Agathémère, Géographie, traduit par Marcel Conche, 1991). Nous savons aussi, à partir des témoignages des auteurs classiques après lui, qu’il a disserté dans son ouvrage intitulé Peri fiseos (Sur la nature) sur les mouvements du niveau de la mer et probablement sur les tremblements de terre. Son interprétation des ces phénomènes, à laquelle l’hypothèse ultérieure de Benoît de Maillet (Telliamed, 1748) ressemble, a été entièrement exogénique. On accuse très souvent les Grecs de ne pas avoir eu une conception linéaire du temps. Pourtant, on peut voir dans le livre d’Anaximandre, qu’il avait une conception linéaire (et infinie !) du temps, dans laquelle il a même pu formuler une théorie du développement de la vie. Une importante implication tirée par Anaximandre de sa théorie historique de la terre concerne les tremblements de terre : Cicéron (dans son Sur la Divination) témoigne de la prédiction, par Anaximandre, d’un tremblement de terre à Sparte (Marcel Conche, 1991). Nous est parvenu le modèle des tremblements de terre d’Anaximène (floruit ca. 546 av. J.-C.), élève d’Anaximandre, selon lequel la terre s’ébranle à cause du dessèchement progressif, avec pour conséquence le croulement de la terre. Il est tout à fait possible que ce modèle ait été celui d’Anaximandre. Il est aussi très probable que ce modèle a été le fondement de l’hypothèse, dite « éponge », de la structure de la terre d’Empédocle (floruit ca. 450 av. J.-C.). Aristote, dans son De Caelo avait écrit que les philosophes pythagoriciens d’Italie n’avaient pas placé la terre au centre de l’univers mais un feu central. Ultérieurement, Simplicius l’a critiqué en disant que les mieux informés pensent que le feu se trouve au centre de la terre et pas au centre du Cosmos ! En se basant sur l’observation du volcanisme et de l’aspect perforé de la terre en Italie méridionale (et, peut-être dans d’autres régions méditerranéennes alors connues), Empédocle a devéloppé (ou amélioré) l’idée d’un feu interne qui réside dans les canaux à l’intérieur de la terre. Maintenant la question qui se présente à nous est : qu’est ce qu’Empédocle a imaginé sur les effets du feu souterrain ? D’abord, il croyait que les pierres se forment sous l’action du feu. Empédocle pensait aussi que les irrégularités de la surface de la terre doivent leur existence au feu interne de la terre. Il est donc devenu le fondateur d’une dynamique interne de la terre indépendante du Soleil : « Empédocle pense que ces falaises, ces rocs et ces pierres qui s’offrent à notre vue, se dressent et surgissent grâce au feu qui brûle dans les profondeurs de la terre et qui les a projetés au dehors. » (Plutarque, De primo frigido, traduit par Jean Bollack, 1969). Ces idées d’Empédocle sur les rouages de notre planète ont eu une influence décisive sur les interprétations de la tectonique de la terre jusqu’à la fin du 18e siècle ! Au temps de la mort de Socrate (399 av. J.-C.), l’idée que la chaleur intérieure de la terre est responsable des mouvements de l’écorce terrestre a été bien respectée à Athène. Le meilleur témoignage des vues sur la tectonique de Platon (428/7-348/7 av. J.-C.), élève de Socrate, nous le trouvons dans le dialogue Phédon (395-382 av. J.-C.). Là nous avons une théorie générale sur la structure et le comportement structural de la terre qui est très empédoclienne. Pourtant il n’est pas toujours facile d’interpréter les descriptions de Platon dans le cadre d’une image visuelle. Mais la première théorie de la tectonique globale proprement dite a été celle d’Aristote (384-322 av. J.-C.) développée à Assos dans un cadre de la géophysique platonienne. Pierre Duhem nous a montré que Théophraste (372/369-288-285 av. J.-C.), comme son maître et ami Aristote avant lui, et comme James Hutton, l’un des fondateurs de la géologie moderne pendant le 18e siècle, niait qu’on pût découvrir des preuves que le monde a commencé et qu’il doit avoir une fin. Théophraste a répondu contre les argumentations de Zénon, qui niait l’éternité (ou incorruptibilité) du monde. L’argumentation de Théophraste montre une excellente compréhension de la force des eaux dans la dégradation de la topographie. Dans sa réponse, il souligne aussi l’existence des facteurs internes qui doivent former la topographie de la terre. C’est précisément la même forme d’argumentation qu’utilisera Hutton, deux millénaires plus tard ! La question de l’origine de montagnes s’est présentée à Ératosthène (274-194 av. J.-C.) quant à l’origine du Mont Taurus. D’après les discussions dans la Géographie de Strabon, nous savons qu’« après avoir dit que la terre dans son ensemble est de forme sphérique, non pas comme un objet fait au tour, mais avec quelques irrégularités » Ératosthène « décrit l’une après l’autre toutes les modifications qui interviennent du fait de l’eau, du feu, des tremblements de terre, des éruptions volcaniques et autres phénomènes du même genre ». Il « vante alors l’opinion de Straton le Physicien et aussi celle de Xanthos de Lydie. D’après Xanthos, il se produisit sous Artaxerxès [roi achéménide de Perse, 464-424 av. J.-C.] une grande sécheresse qui eut pour conséquence de tarir fleuves, lacs et puits ; sachant, par ailleurs qu’en plusieurs endroits, situés à bonne distance de la mer, on trouvait des pétrifications en forme de coquillages ou de pétoncles, des empreintes de valves et de l’eau saumâtre, notamment en Arménie, en Matiène et en basse Phrygie, il en tirait la conviction que ces plaines avaient jadis été occupées par la mer » (Strabon, I, 3. 3, traduction de Germaine Aujac). Les idées tectoniques de Strabon (Amasya) (64/63 av. J.-C.-23/25 AD) sont en principe les mêmes que celles d’Ératosthène. Il décrit les tremblements de terre, les sources chaudes, l’activité volcanique actuelle et du passé, et les changements topographiques associés. Les produits volcaniques ici (les fumerolles) sont décrits par Strabon aussi comme le « plutonium » (Strabon, V. 4. 5). Strabon a expliqué les courants du Bosphore et des Dardanelles avec l’hypothèse d’un soulèvement du fond de la Mer Noire (Pontus Euxinus). Après avoir rejeté la possibilité des changements permanents du niveau de la mer à cause d’une augmentation du volume de l’eau, Strabon explique son mécanisme pour les changements du niveau du sol de la mer qui est entièrement aristotélicien. Avec Strabon nous sommes donc revenus au modèle d’Aristote ! Pourquoi le Mont Taurus était-il conçu de façon tellement linéaire par les deux grands géographes de l’Antiquité ? Leur grand successeur Alexandre de Humboldt (1769-1859) nous fournit la réponse : « On se demande d’où les Grecs ont pu tirer une notion en partie très exacte sur la direction continue d’une haute chaîne de montagnes suivant dans sa direction un même parallèle bien au-delà des sources du Gange ? Cette opinion était-elle purement hypothétique et fondée sur une certaine prédilection pour la régularité des formes ? » (de Humboldt, Asie Centrale, 1843, t. I, pp.132-133). Nous savons que l’apogée de la géographie antique, Claude Ptolémée d’Alexandrie (90-168 AD), a travaillé dans la même tradition de régularisme. | ||
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Version du 6 mai 2020 à 21:58
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Conception : Clarification - Explicitation
- Uniformitarisme
L'uniformitarisme est un des principes de base de la géologie moderne. Il postule que les processus qui se sont exercés dans le passé lointain s'exercent encore de nos jours. L'adage « le présent est la clé du passé » résume la méthode qui en découle. Ce principe s'oppose au catastrophisme selon lequel les caractéristiques de la surface terrestre sont apparues soudainement dans le passé à partir de processus radicalement différents de ceux qui sont à l’œuvre aujourd'hui.
- Catastrophisme: théorie scientifique qui étudie les causes et les conséquences astronomiques, géologiques, écologiques, biologiques, humaines et historiques de cataclysmes de grande ampleur qui ont eu lieu et qui pourraient encore avoir lieu sur la Terre.
En géologie: Théorie selon laquelle les modifications survenues à la surface de la Terre seraient dues à des catastrophes naturelles.
En biologie: Théorie fixiste selon laquelle les espèces s'éteignent en masse à la suite d'épisodes de catastrophes, les régions dévastées sont ensuite repeuplées par une faune et une flore venus d'ailleurs.
Modèle:La Théorie du Catastrophisme
- Le catastrophisme est une théorie scientifique qui tente de construire rationnellement les croyances sur l'origine du monde et sur l'évolution des espèces en mettant en avant l'impact qu'auraient eu des catastrophes de courte durée, violentes et inhabituelles. Un nom pour ce type de théorie est apparue au XIXe siècle, lorsqu'est apparu l'uniformitarisme, théorie qui, quant à elle, postule que les processus qui se sont exercés dans un passé lointain s'exercent encore de nos jours.
- Le Déluge est l’histoire d’une inondation supposée universelle. Celui-ci est connu de nous sous plusieurs versions. La question fondamentale ici était toujours : quel avait été le mécanisme ?
● Une montée universelle des eaux de la mer ? (Dans ce cas, l’inondation doit être simultanée partout).
● Le soulèvement d’un continent ou d’une autre partie de la terre ferme ? (Dans ce cas, l’inondation doit être locale, à l’échelle de la région montante). Dans les versions mésopotamiennes, judaïque et dans celle de Deucalion des Grecs, c’est la montée universelle du niveau de la mer qui a été la cause du Déluge. Plusieurs agents ont été considérés comme les moteurs du désastre : le vent, la pluie et les vagues de la mer. La soi-disant universalité du Déluge est attestée par la prétendue destruction de tous les êtres vivants sauf les voyageurs dans l’arche, mais il y a des complications dans les différentes versions.
Si le Déluge a vraiment été universel, on peut le considérer comme un marqueur global de temps. On trouve plusieurs mentions dans les récits mythologiques des témoins physiques du Déluge, c’est-à-dire d’enregistrements géologiques et géomorphologiques. On sait que dans le développement de la géologie, l’idée du Déluge biblique a joué un rôle principal dans l’explication de l’origine de la topographie actuelle et dans le développement de la stratigraphie. Étonnamment, ce rôle est devenu beaucoup plus important depuis la Renaissance à cause de la plus grande accessibilité de la Sainte Écriture au grand public après la Réforme.
Modèle:Une idée de l'uniformitarisme à l'Antiquité: Cas de la Tectonique
- Dans le cadre de la définition de la science donnée par Popper, les hypothèses développées par les penseurs grecs de la Grèce continentale, d’Ionie et d’Italie méridionale à partir du 6e siècle av. J.-C., ont été strictement scientifiques. Cette manière de penser a été introduite par deux hommes de la ville de Milet en Ionie (Turquie du sud-est) : Thalès (floruit ca. 575 av. J.-C.) et Anaximandre (floruit ca. 560 av. J.-C.). Thalès a été le premier homme à avoir formulé son savoir en généralisations théoriques qui sont testables par observation. Après avoir développé quelques théorèmes géométriques, Thalès a proposé d’approcher les problèmes de la nature avec la même méthode de généralisation. Il a rationalisé le concept sumérien de « tarkullu » dans le cadre de son hypothèse d’un disque terrestre flottant sur les eaux de l’océan. La différence énorme et vitale entre le concept de « tarkullu » et l’hypothèse de Thalès est ce que le premier a été un concept mythologiqe intouchable ; par contre, le second a pris la forme d’une hypothèse scientifique, offerte libéralement à la critique. Anaximandre, ami et élève (ou seulement auditeur) de Thalès d’après la tradition doxographique, a relevé le défi et répondu comme suit : « ...la terre est suspendue, soutenue par rien, mais stable à cause de son égal éloignement de tout. Sa forme est courbée, arrondie à la façon d’une colonne de pierre ; sur l’une nous marchons, mais l’autre se trouve à l’opposé. » (Hyppolite, Refutatio : traduction de Marcel Conche, 1991). Il croyait que nous vivions sur une surface plate de ce cylindre. C’est pourquoi il pensait que ce serait utile de dessiner une carte de cette surface : « Anaximandre le Milésien, auditeur de Thalès, le premier eut l’audace d’inscrire la terre habitée sur une tablette. Après lui, Hécatée le Milésien, grand voyageur, rendit la carte plus précise, si bien qu’elle devint un objet d’admiration. » (Agathémère, Géographie, traduit par Marcel Conche, 1991). Nous savons aussi, à partir des témoignages des auteurs classiques après lui, qu’il a disserté dans son ouvrage intitulé Peri fiseos (Sur la nature) sur les mouvements du niveau de la mer et probablement sur les tremblements de terre. Son interprétation des ces phénomènes, à laquelle l’hypothèse ultérieure de Benoît de Maillet (Telliamed, 1748) ressemble, a été entièrement exogénique. On accuse très souvent les Grecs de ne pas avoir eu une conception linéaire du temps. Pourtant, on peut voir dans le livre d’Anaximandre, qu’il avait une conception linéaire (et infinie !) du temps, dans laquelle il a même pu formuler une théorie du développement de la vie. Une importante implication tirée par Anaximandre de sa théorie historique de la terre concerne les tremblements de terre : Cicéron (dans son Sur la Divination) témoigne de la prédiction, par Anaximandre, d’un tremblement de terre à Sparte (Marcel Conche, 1991). Nous est parvenu le modèle des tremblements de terre d’Anaximène (floruit ca. 546 av. J.-C.), élève d’Anaximandre, selon lequel la terre s’ébranle à cause du dessèchement progressif, avec pour conséquence le croulement de la terre. Il est tout à fait possible que ce modèle ait été celui d’Anaximandre. Il est aussi très probable que ce modèle a été le fondement de l’hypothèse, dite « éponge », de la structure de la terre d’Empédocle (floruit ca. 450 av. J.-C.). Aristote, dans son De Caelo avait écrit que les philosophes pythagoriciens d’Italie n’avaient pas placé la terre au centre de l’univers mais un feu central. Ultérieurement, Simplicius l’a critiqué en disant que les mieux informés pensent que le feu se trouve au centre de la terre et pas au centre du Cosmos ! En se basant sur l’observation du volcanisme et de l’aspect perforé de la terre en Italie méridionale (et, peut-être dans d’autres régions méditerranéennes alors connues), Empédocle a devéloppé (ou amélioré) l’idée d’un feu interne qui réside dans les canaux à l’intérieur de la terre. Maintenant la question qui se présente à nous est : qu’est ce qu’Empédocle a imaginé sur les effets du feu souterrain ? D’abord, il croyait que les pierres se forment sous l’action du feu. Empédocle pensait aussi que les irrégularités de la surface de la terre doivent leur existence au feu interne de la terre. Il est donc devenu le fondateur d’une dynamique interne de la terre indépendante du Soleil : « Empédocle pense que ces falaises, ces rocs et ces pierres qui s’offrent à notre vue, se dressent et surgissent grâce au feu qui brûle dans les profondeurs de la terre et qui les a projetés au dehors. » (Plutarque, De primo frigido, traduit par Jean Bollack, 1969). Ces idées d’Empédocle sur les rouages de notre planète ont eu une influence décisive sur les interprétations de la tectonique de la terre jusqu’à la fin du 18e siècle ! Au temps de la mort de Socrate (399 av. J.-C.), l’idée que la chaleur intérieure de la terre est responsable des mouvements de l’écorce terrestre a été bien respectée à Athène. Le meilleur témoignage des vues sur la tectonique de Platon (428/7-348/7 av. J.-C.), élève de Socrate, nous le trouvons dans le dialogue Phédon (395-382 av. J.-C.). Là nous avons une théorie générale sur la structure et le comportement structural de la terre qui est très empédoclienne. Pourtant il n’est pas toujours facile d’interpréter les descriptions de Platon dans le cadre d’une image visuelle. Mais la première théorie de la tectonique globale proprement dite a été celle d’Aristote (384-322 av. J.-C.) développée à Assos dans un cadre de la géophysique platonienne. Pierre Duhem nous a montré que Théophraste (372/369-288-285 av. J.-C.), comme son maître et ami Aristote avant lui, et comme James Hutton, l’un des fondateurs de la géologie moderne pendant le 18e siècle, niait qu’on pût découvrir des preuves que le monde a commencé et qu’il doit avoir une fin. Théophraste a répondu contre les argumentations de Zénon, qui niait l’éternité (ou incorruptibilité) du monde. L’argumentation de Théophraste montre une excellente compréhension de la force des eaux dans la dégradation de la topographie. Dans sa réponse, il souligne aussi l’existence des facteurs internes qui doivent former la topographie de la terre. C’est précisément la même forme d’argumentation qu’utilisera Hutton, deux millénaires plus tard ! La question de l’origine de montagnes s’est présentée à Ératosthène (274-194 av. J.-C.) quant à l’origine du Mont Taurus. D’après les discussions dans la Géographie de Strabon, nous savons qu’« après avoir dit que la terre dans son ensemble est de forme sphérique, non pas comme un objet fait au tour, mais avec quelques irrégularités » Ératosthène « décrit l’une après l’autre toutes les modifications qui interviennent du fait de l’eau, du feu, des tremblements de terre, des éruptions volcaniques et autres phénomènes du même genre ». Il « vante alors l’opinion de Straton le Physicien et aussi celle de Xanthos de Lydie. D’après Xanthos, il se produisit sous Artaxerxès [roi achéménide de Perse, 464-424 av. J.-C.] une grande sécheresse qui eut pour conséquence de tarir fleuves, lacs et puits ; sachant, par ailleurs qu’en plusieurs endroits, situés à bonne distance de la mer, on trouvait des pétrifications en forme de coquillages ou de pétoncles, des empreintes de valves et de l’eau saumâtre, notamment en Arménie, en Matiène et en basse Phrygie, il en tirait la conviction que ces plaines avaient jadis été occupées par la mer » (Strabon, I, 3. 3, traduction de Germaine Aujac). Les idées tectoniques de Strabon (Amasya) (64/63 av. J.-C.-23/25 AD) sont en principe les mêmes que celles d’Ératosthène. Il décrit les tremblements de terre, les sources chaudes, l’activité volcanique actuelle et du passé, et les changements topographiques associés. Les produits volcaniques ici (les fumerolles) sont décrits par Strabon aussi comme le « plutonium » (Strabon, V. 4. 5). Strabon a expliqué les courants du Bosphore et des Dardanelles avec l’hypothèse d’un soulèvement du fond de la Mer Noire (Pontus Euxinus). Après avoir rejeté la possibilité des changements permanents du niveau de la mer à cause d’une augmentation du volume de l’eau, Strabon explique son mécanisme pour les changements du niveau du sol de la mer qui est entièrement aristotélicien. Avec Strabon nous sommes donc revenus au modèle d’Aristote ! Pourquoi le Mont Taurus était-il conçu de façon tellement linéaire par les deux grands géographes de l’Antiquité ? Leur grand successeur Alexandre de Humboldt (1769-1859) nous fournit la réponse : « On se demande d’où les Grecs ont pu tirer une notion en partie très exacte sur la direction continue d’une haute chaîne de montagnes suivant dans sa direction un même parallèle bien au-delà des sources du Gange ? Cette opinion était-elle purement hypothétique et fondée sur une certaine prédilection pour la régularité des formes ? » (de Humboldt, Asie Centrale, 1843, t. I, pp.132-133). Nous savons que l’apogée de la géographie antique, Claude Ptolémée d’Alexandrie (90-168 AD), a travaillé dans la même tradition de régularisme.
Conceptions erronées et origines possibles
- Selon le Catastrophisme, les espèces s'éteignaient à cause de catastrophes locales ou d'échelle planétaire, suivies par la formation de nouvelles espèces ex nihilo c'est-à-dire que les espèces éteintes étaient retrouvées sous la forme de fossiles et que les espèces nouvelles étaient considérées comme immuables (Fixisme).
- Le Catastrophisme était en accord avec l'épisode biblique : les fossiles étaient les restes d'espèces n'ayant pas trouvé de place sur l'Arche de Noé, la dernière catastrophe étant le Déluge.
- Uniformitarisme-Catastrophisme:
_ Le catastrophisme paléontologique met en exergue une "idéologie géologique" dont le principe rattachant les événements de l'histoire paléontologique aux cataclysmes des épisodes bibliques et religieux pour les justifier,c'est diamétralement contraire à l'uniformitarisme qui met la continuité des phénomènes de la période étudier jusqu'à aujourd'hui.
Quel a été l’état du catastrophisme dans l’Antiquité ? La plupart des Présocratiques ont été des uniformistes, au moins graduélistes/ évolutionistes dans l’explication de l’histoire de la terre et de la vie (voir l’histoire géologique selon Anaximandre). Les atomistes (les Présocratiques comme Démocrite et les Postsocratiques comme Lucrèce) ont aussi été du même avis. Par contre, la plupart des Postsocratiques à partir de Platon ont été des catastrophistes dans l’explication de l’histoire de la terre et de la vie. Tous les grands géographes de l’antiquité (avec l’exception possible d’Ératosthène) ont été aussi des catastrophistes. (Alors la plus grande catastrophe connue a été la destruction d’Atlantis, qui était considérée comme un événement historique).Conclusion : Déjà dans l’Antiquité nous pouvons discerner deux manières de voir dans les sciences de la terre, en particulier en tectonique : un groupe des irrégularistes/uniformistes et un autre groupe des régularistes/catastrophistes. Dans le cours de ces leçons, nous pourrons voir que les mêmes groupes garderont leurs identités jusqu’à nos jours !
Conceptions: Origines possibles
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Éléments graphique
Stratégie de changement conceptuel
- Le disciple de Cuvier Alcide d'Orbigny, justifia le catastrophisme en dénombrant dans les coupures stratigraphiques 28 grandes crises au niveau des fossiles qui s'étaient produites sur 6 000 ans (âge de la Terre selon la Bible).
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Questions possibles
Bibliographie
Pour citer cette page: (- Catastrophisme)
ABROUGUI, M & al, 2020. Uniformitarisme - Catastrophisme. In Didaquest [en ligne]. <http:www.didaquest.org/wiki/Uniformitarisme_-_Catastrophisme>, consulté le 22, décembre, 2024
- Chaire internationale M. A.M. Celâl S ̧ engör, professeur
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