Obstacles en didactique

Concept d'obstacle en didactique

Le concept d’obstacle en didactique s'appuie sur les travaux de Gaston Bachelard, qui a été le premier à définir les obstacles épistémologiques en 1938. Son influence a été significative dans le domaine de la recherche en didactique, notamment en association avec le concept d’objectif-obstacle développé par Martinand en 1986. Ces idées ont été largement promues par divers auteurs tels que Drouin & Astolfi (1987), Astolfi & Peterfalvi (1993, 1997), Astolfi et al. (1997a), Astolfi, Petefalvi & Vérin (1998), ainsi que par les travaux d'Astolfi lui-même (1987b, 1989, 1990, 1992, 2008) et Peterfalvi (1997).

L’objectif de l’analyse de conceptions n’est pas de les juger comme étant « fausses », mais d’identifier quels obstacles sont à l’origine de ces conceptions, afin de définir ensuite des objectifs-obstacles. (Jean-Jacques Drouin)

Typologie des obstacles en didactique

La compréhension des obstacles en didactique est essentielle pour concevoir ou analyser des stratégies éducatives. Quatre types principaux d'obstacles émergent dans ce contexte, chacun ayant des implications spécifiques sur le processus d'enseignement et d'apprentissage. Les obstacles ontogéniques reflètent les limitations neurophysiologiques propres à chaque stade du développement des apprenants, tandis que les obstacles épistémologiques se manifestent lors de conflits entre les connaissances existantes et les nouveaux savoirs. Les obstacles didactiques, introduits par le système éducatif, résultent de choix pédagogiques ou didactique inappropriés, entravant la compréhension des concepts. Enfin, les obstacles socioculturels englobent les difficultés découlant des différences culturelles, sociales et économiques entre les apprenants. Cette classification fournit un cadre pour analyser les défis spécifiques auxquels les enseignants sont confrontés et pour élaborer des approches éducatives adaptées afin de favoriser une compréhension approfondie des concepts enseignés.

Obstacle Ontogénique

• L'obstacle ontogénique (parfois dénomé obstacle psychogénétique) survient en raison des limitations, notamment neurophysiologiques, propres au sujet à un moment spécifique de son développement (Brousseau, 1978). Ces limitations, étudiées par des chercheurs tels que Piaget, sont spécifiques à chaque niveau de complexité d'une discipline scientifique. Les obstacles ontogéniques sont liés aux différences individuelles dans la maturation intellectuelle et la construction des connaissances des apprenants.

Obstacle Épistémologique

• L'obstacle épistémologique correspond aux difficultés analysées par des chercheurs tels qu'Astolfi, à partir de la définition proposée par Bachelard (1938). Il se manifeste lorsque les faits de la vie quotidienne s'opposent à l'acquisition de connaissances scientifiques, que ce soit dans l'histoire des sciences ou lors de la construction par l'apprenant de nouvelles connaissances. Les obstacles épistémologiques sont liés aux conflits entre les connaissances existantes et les nouvelles informations à assimiler, créant des barrières cognitives.

Exemples d'obstacles épistémologiques

L'analyse des obstacles épistémologiques est abordée de manière approfondie dans l'ouvrage classique de Gaston Bachelard, intitulé "La Formation de l'esprit scientifique", publié pour la première fois en 1938. Bachelard identifie et détaille dix obstacles majeurs à la compréhension scientifique. Parmi ceux-ci, on trouve:

• L’expérience première : L'aspect impressionnant d'un phénomène peut masquer son importance du point de vue de la connaissance.
• La connaissance générale : Une généralisation trop rapide peut faire perdre de vue certaines caractéristiques essentielles d'un phénomène.
• L’obstacle verbal : Nommer un phénomène ne peut pas tenir lieu d'explication.
• La connaissance pragmatique : Expliquer un phénomène en se basant sur son utilité par rapport à nous.
• L’obstacle substantialiste : La recherche d'une substance, croyant que seul un support matériel pourrait expliquer un phénomène.
• Le réalisme : Pour Bachelard, c'est un trouble lié à la possession.
• L’obstacle animiste : Attribuer à des objets inertes des propriétés propres aux organismes vivants.
• Le mythe de la digestion : La pensée selon laquelle tous les phénomènes procèdent comme le corps humain, par ingestion, digestion et sécrétion.
• La libido : Projection de caractères sexuels sur des phénomènes n'ayant pas de relation avec la reproduction.
• La connaissance quantitative : La croyance que la précision d'une mesure donne la possession de l'objet.

Obstacle Didactique

• L'obstacle didactique (parfois dénomé obstacle d'enseignement) est introduit par le système éducatif, que ce soit par l'enseignant, le programme d'études ou les manuels scolaires. Ces obstacles sont des barrières à l'apprentissage créées par des choix pédagogiques inappropriés, des présentations peu claires, des exemples mal adaptés ou d'autres aspects de la méthode d'enseignement. Les obstacles didactiques résultent de décisions éducatives qui peuvent entraver la compréhension du concept par les élèves. Ils nécessitent une prise de conscience de la part de l'enseignant pour être surmontés.

Exemples d'obstacles didactique

Il est évident que connaitre tous les obstacles susceptibles d’être rencontrés par les élèves pour un apprentissage donné est illusoire. En revanche, pour faciliter l’étape d’identification des obstacles il est possible d’établir une liste générale, non exhaustive, de leurs origines possibles et probables :

• Obstacles liés au langage;
• Obstacles liés à la simplification excessive du savoir;
• Obstacles liés à la nature du savoir lui-même;
• Obstacles liés à des notions nécessaires à la compréhension (prérequis);
• Obstacles générés par les livres et les manuels scolaires;
• Obstacles générés par la modélisation;
• Obstacles liés au style d’apprentissage de l’apprenant;
• Obstacles en rapport avec les actions éducatives menées par l’enseignant.

Obstacle Socioculturel

• L'obstacle socioculturel (parfois dénomé obstacle idéologique) concerne les difficultés liées aux différences culturelles, sociales et économiques entre les apprenants. Ces obstacles incluent des malentendus dus à des contextes culturels différents, des différences de langue, des normes sociales divergentes ou des expériences de vie variées. Les facteurs socioculturels peuvent influencer la manière dont les élèves abordent et comprennent les concepts enseignés, créant ainsi des défis supplémentaires à surmonter pendant le processus d'apprentissage. La reconnaissance de ces différences culturelles est cruciale pour promouvoir un environnement d'apprentissage inclusif.

L'obstacle au processus d'apprentissage

Un obstacle au processus d'apprentissage désigne toute entrave ou difficulté qui compromet la capacité d'un individu à acquérir de nouvelles connaissances ou compétences de manière efficace et significative.

Nature de l'obstacle au processus d'apprentissage

• Variété : Les obstacles d'apprentissage peuvent prendre différentes formes, telles que conceptuelles, linguistiques, affectives, sociales, motivationnelles, développementales, méthodologiques, technologiques, environnementales et culturelles.

• Complexité : Certains obstacles d'apprentissage peuvent être simples et ponctuels, tandis que d'autres sont plus complexes et profondément enracinés dans les circonstances individuelles ou environnementales.

Caractéristiques de l'obstacle au processus d'apprentissage

• Spécificité : Chaque obstacle peut être spécifique à l'individu ou au contexte d'apprentissage, nécessitant ainsi des approches personnalisées pour les surmonter.
• Interrelation : Les obstacles peuvent interagir les uns avec les autres, créant des obstacles multiples et complexes dans le processus d'apprentissage.

Impact sur l'apprentissage

• Ralentissement ou Arrêt : Les obstacles peuvent ralentir ou interrompre le rythme d'apprentissage d'un individu, retardant ainsi sa progression dans l'acquisition de connaissances.

Frustration : La présence d'obstacles peut entraîner des sentiments de frustration, d'incertitude ou de découragement chez l'apprenant, affectant ainsi son engagement et sa motivation.

Identification et gestion des obstacles au processus d'apprentissage

• Évaluation : Il est essentiel d'identifier et d'évaluer les obstacles spécifiques rencontrés par les apprenants, en tenant compte de leur nature et de leur impact sur l'apprentissage.
• Stratégies d'intervention : Des stratégies d'intervention variées peuvent être mises en œuvre pour surmonter les obstacles, telles que des ajustements pédagogiques, un soutien émotionnel, des modifications environnementales ou des interventions spécifiques.

Importance de la sensibilisation et de l'adaptabilité

• Sensibilisation : La reconnaissance des obstacles au sein du processus d'apprentissage est essentielle pour promouvoir une éducation inclusive et équitable.
• Adaptabilité : Les enseignants et les institutions éducatives doivent être flexibles et adaptatifs pour répondre aux besoins individuels des apprenants et surmonter les obstacles à l'apprentissage.

Comprendre, reconnaître et surmonter les obstacles au processus d'apprentissage est crucial pour favoriser un environnement éducatif favorable à la réussite de tous les apprenants, quelles que soient leurs différences individuelles ou leurs circonstances particulières.

Ne pas confondre

Obstacles à l'apprentissage - Obstacles en didactique - Obstacles didactique

Références bibliographiques

VOIR AUSSI: https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-03891619/document

• Leibnitz (1704). Nouveaux essais sur l’entendement humain.

• Condillac (1754). Traité des sensations.

• Bachelard G (1938). La formation de l’esprit scientifique. Paris : Vrin.

• Piaget J. (1937). La construction du réel chez l’enfant. Delachaux & Niestlé.

• Le Pichon X., Francheteau J. et Bonnin J. (1973). Plate Tectonics, Elsevier, 300 p.

• Gohau G. (1987/1990). Une histoire de la géologie. Paris : Seuil.

• Martinand J-L (1986). Connaître et transformer la matière. Berne : Peter Lang.

• Bednarz N., Garnier C. & Brousseau G. (1988). Construction des savoirs. Obstacles et conflits. Ottawa : Agence Arc.

• Fabre M. (1995). Bachelard éducateur. Paris : Presses universitaires de France.

• Giordan A. & De Vecchi, G. (1994). Les origines du savoir : des conceptions des apprenants aux concepts scientifiques. Neuchâtel Lausanne: Delachaux et Niestlé.

• Astolfi, JP. & Demounem, R. (1996). Didactique des sciences de la vie et de la terre. Paris: Nathan pédagogie.

• GOHAU Gabriel. (1995) « Traquer les obstacles épistémologiques à travers les lapsus d’élèves et d’écrivains.» Aster, nᵒ 20, p. 197.*

• Fabre M. & Orange C. (1997). « Construction des problèmes et franchissements d’obstacles. » Aster, n°24, p28-38.

• Astolfi JP., Peterfalvi B. & Vérin A. (1998). Comment les enfants apprennent les sciences. Paris: Retz.

• De Vecchi, G. & Giordan, A. (2002). L'enseignement scientifique : comment faire pour que « ça marche ?. Paris : Delagrave Pédagogie et formation.*

• Giordan A (1995). Les conceptions de l’apprenant comme tremplin pour l’apprentissage [en ligne].

• Giordan A. (2002). Apprendre !. Belin nouvelle édition.