Pourquoi, malgré d'inévitables incertitudes, il faut lutter contre le réchauffement climatique

De Didaquest
Aller à la navigationAller à la recherche

Pour répondre a cette question nous avons utiliser un article envoyé à Verte par Karl Desfontaines.

Article de Karl Desfontaines

Pourquoi, malgré d'inévitables incertitudes, il faut lutter contre le réchauffement climatique ?

Article envoyé à Croissance Verte par Karl Desfontaines.

Ce court article a pour objectif de faire comprendre simplement la notion de changement climatique, et les grands dangers associés qui pèsent sur l'humanité le jour où un changement brutal adviendra.

Le climat terrestre est en effet un système de type "chaotique", avec de nombreux états d'équilibre. Un de ces états d'équilibre est celui du climat actuel dans le monde, en place depuis la dernière glaciation il y a environ 10 000 ans : il est caractérisé par une bonne stabilité, des écarts de températures de l'ordre du °C sur l'ensemble du globe et pas de changements majeurs des équilibres atmosphériques et océaniques. Il y a bien eu quelques modifications non négligeables du climat depuis (ex : la "mini-ère glaciaire" du 15è au 17è siècle), qui semble correspondre à un état d'équilibre distinct mais "assez voisin" de l'état actuel. A l'inverse, les périodes glaciaires et inter-glaciaires des derniers millions d'années correspondaient à d'autres états d'équilibres, manifestement distincts de l'état d'équilibre actuel.

Afin de mieux comprendre la situation du climat, faisons un parallèle avec un ballon lancé sur un terrain vallonné : le ballon va rouler et finir par se stabiliser au fond d'une vallée / d'un trou, qui est un point d'équilibre (ce qu'on appelle un "minimum local" en physique). Même s'il y a quelques perturbations (ex : un peu de vent tourbillonnant qui le fait bouger légèrement), le ballon va rester dans ce trou. Aujourd'hui et depuis quelques millénaires, le climat terrestre est dans un minimum local : de même, les quelques perturbations du système (éruption volcanique du Krakatoa, déforestation de l'amazonie, hausse du taux de CO2, etc ...) perturbent le système mais n'ont pas remis en cause jusqu'à présent l'équilibre global du climat terrestre.

Maintenant, voyons de manière plus détaillée les impacts d'une perturbation du ballon (resp. du climat) par un coup de vent ou de pied (resp. une déforestation massive, une injection de CO2 dans l'atmosphère, un météorite qui tomberait sur la terre, ...). Les perturbations vont faire bouger le ballon (resp. modifier le climat) :

Si la perturbation est faible et ponctuelle (petit coup de pied), il va bouger légèrement et revenir approximativement à sa position initiale. Pour le climat, ça peut-être la conséquence d'un gros volcan qui modifie le climat à cause des cendres envoyées dans l'atmosphère : après quelques années, c'est "oublié" (les cendres sont retombées). Si la perturbation est faible et continue (le vent souffle faiblement dans un direction donnée à une force donnée sur le ballon), le ballon va un peu monter la pente du trou où il est (tout en y restant, le vent étant faible). Pour le climat, un taux de CO2 un peu plus élevé réchauffe légèrement la terre, sans plus de conséquences : c'est apparemment ce que nous observons depuis quelques décennies. Si le vent souffle plus fort, le ballon va plus remonter (resp. le climat plus se réchauffer) mais l'équilibre reste le même : le ballon ne change pas de vallée. Pour le climat, la température augmente significativement mais l'équilibre global ne change pas vraiment : c'est la seule chose modélisable par les modèles de réchauffement climatique ("x% de CO2 en plus génère une modification de y degrés"). Les modèles climatiques essaient de déterminer la relation complexe entre taux de CO2 et température, et si possible de la différencier par région du globe. Maintenant, si le vent se met à souffler suffisamment fort, il peut emporter le ballon qui sort de sa vallée et "part à l'aventure", jusqu'à ce qu'il trouve une nouvelle vallée suffisamment profonde et/ou à l'abri du vent pour se stabiliser : cela peut-être 2 mètres plus loin, ou potentiellement des km plus loin ... Et généralement, il est très difficile de savoir là où le ballon va se stabiliser. Pour le climat, c'est le basculement d'un état d'équilibre à un autre : l'excès de température "casse" l'équilibre actuel et le système part à la recherche d'un nouvel équilibre (comme lors des passages d'un âge glaciaire à un âge inter-glaciaire). Malheureusement, pour le climat, de nombreux paramètres changent simultanément : les courants océaniques, la circulation atmosphérique, les couvertures nuageuses, la couverture glaciaire, la végétation, etc ..., le tout de manière fortement corrélée avec d'innombrables rétro-actions positives et négatives : il est donc absolument impossible de prédire dans quel nouvel état d'équilibre le climat va se stabiliser ! Sur ce dernier point, pour expliquer cette non-prédictibilité "fondamentale", voici un autre exemple illustratif : envoyez un coup de pelleteuse dans un mur. Le mur, qui était dans un état d'équilibre donné, va très certainement se retrouver dans un nouvel état d'équilibre nettement distinct de l'état précédent, et ressemblant vraisemblablement à un tas de gravats. Maintenant, essayez de prévoir à l'avance et de manière précise la position de chacune des briques du mur dans le futur tas de gravats : c'est absolument impossible, quels que soient les efforts faits pour modéliser l'impact. Idem pour le climat, si nous sortons de l'équilibre actuel, c'est une grande loterie, impossible de prévoir le futur l'état d'équilibre (ni même le temps nécessaire pour l'atteindre : années, décennies, siècles, millénaires ?).

Voici de manière plus détaillée le parallèle entre les perturbations du ballon et celles du climat, ainsi que l'impact humain des modifications climatiques :


Extrait-de-article-Karl-Desfontaines.jpg


En complément de ce parallèle instructif, l'article http://www.contreinfo.info/article.php3?id_article=2094 illustre deux choses sur le basculement d'un état d'équilibre climatique à un autre :

  • c'est une réalité, la terre l'a vécue à de nombreuses reprises par le passé, le dernier basculement notable étant l'âge glacière d'il y a environ 10 000 ans.
  • ce basculement climatique (le passage du ballon d'un trou à un autre) peut être extrêmement rapide et se mesurer en années (voire en mois ?) ...

Le changement climatique n'est donc pas, comme on aurait pu aisément l'imaginer, un long changement étalé sur plusieurs siècles (et auquel l'humanité pourrait s'adapter relativement bien) : ce problème pourrait malheureusement nous concerner très directement à court ou moyen terme !

Tant que nous restons dans notre "vallon" (+x% de CO2, réchauffement de y degrés), la situation devrait être gérable. Mais si nous en sortons, nul ne sait (et nul ne pourra savoir) ce qui adviendra : cela pourrait être relativement anodin (ex : le mini-âge glacière du 17è siècle) ou absolument dramatique ... Dans le doute, le "principe de précaution" me semble opportun.

La question clé aujourd'hui est donc de déterminer aussi précisément que possible le seuil à ne pas dépasser en terme de concentration de CO2 dans l'atmosphère, afin de ne pas faire sortir le climat terrestre de sa stabilité relative actuelle (ie son "vallon" des derniers millénaires) : les travaux du GIEC essaient justement de déterminer les seuils raisonnables de CO2 à ne pas dépasser. Malheureusement, les scientifiques doivent être humbles et reconnaître qu'il est extrêmement difficile de déterminer un seuil précis ..., ce qui ne facilitera pas les difficiles décisions politiques à prendre au niveau international.

Cependant, le message à retenir est simple :

Il y a un seuil de CO2 atmosphérique à NE PAS dépasser (sauf à souhaiter un changement, potentiellement radical, du climat terrestre !) Ce seuil est malheureusement très difficile à estimer, avec une forte incertitude, et nous n'en sommes probablement plus très éloignés (en espérant ne pas l'avoir déjà franchit : à ce propos, la très forte fonte de la calotte polaire ces 2 dernières années est un signal inquiétant qui pourrait indiquer les prémices d'un "basculement" : pourvu que ce ne soit pas un réel basculement, ou sinon qu'il soit "mineur" et local) Si nous dépassons ce seuil, nul ne sait ce qui adviendra du climat terrestre mais cela annoncera certainement une période (au mieux) difficile pour l'humanité

Dans le doute, il me semble donc grand temps d'agir et de faire collectivement de notre mieux pour ne pas franchir le point de non-retour d'un changement climatique ! Pour cela, la prudence imposerait notamment de stopper dès que possible la hausse du taux de CO2 dans l'atmosphère.

Références