Effet de serre
L'effet de serre est une théorie[1] décrivant un processus naturel de réchauffement de l'atmosphère qui interviendrait dans le bilan radiatif de la Terre. Il serait dû aux gaz à effet de serre (GES) contenus dans l'atmosphère, à savoir principalement la vapeur d'eau (qui contribuerait le plus à l'effet de serre), le dioxyde de carbone CO2 et le méthane CH4.
Cet effet a été nommé ainsi par analogie avec la pratique en culture et jardinerie de construire des serres, espaces clos dont une ou plusieurs faces sont transparentes, laissant passer le rayonnement du Soleil et le retenant prisonnier à l'intérieur. Ce serait le piégeage des infrarouges qui entraînerait une augmentation de la température.
Mécanisme
Lorsque le rayonnement solaire atteint l'atmosphère terrestre, une partie (environ 28,3 %) est directement réfléchie (renvoyée vers l'espace), par l'air, les nuages blancs et la surface claire de la Terre (en particulier les régions blanches et glacées comme l'Arctique et l'Antarctique), c'est l'albédo (non représenté sur le schéma). Les rayons incidents qui n'ont pas été réfléchis vers l'espace sont absorbés par l'atmosphère (20,7 %) et/ou la surface terrestre (51 %).
Cette dernière partie du rayonnement absorbée par la surface du sol lui apporte de la chaleur (énergie), qu'elle restitue à son tour, le jour comme la nuit, en direction de l'atmosphère sous forme de rayons infrarouges. C'est le « rayonnement du corps noir ». Ce rayonnement est alors absorbé en partie par les gaz à effet de serre, ce qui réchauffe l'atmosphère. Puis dans un troisième temps, cette chaleur est réémise dans toutes les directions, notamment vers la Terre.
C'est ce rayonnement qui retourne vers la Terre qui constitue l'effet de serre, il est à l'origine d'un apport supplémentaire de chaleur à la surface terrestre. Sans ce phénomène, la température moyenne sur Terre chuterait d'abord à -18 °C. Puis, la glace s'étendant sur le globe, l'albédo terrestre augmenterait et la température se stabiliserait vraisemblablement à -100°C.
On peut considérer l'atmosphère comme un réservoir d'énergie. Si l'effet de serre est plus efficace pour retenir (en fait ralentir la déperdition de l'énergie) l'énergie, ce réservoir se remplit - et l'énergie emmagasinée par la surface terrestre augmente .
En moyenne, l'énergie venue de l'espace et reçue par la Terre, et l'énergie de la Terre émise vers l'espace sont quasiment égales. Si ce n'était pas le cas, la température de surface de la Terre augmenterait sans cesse ou diminuerait sans cesse. En effet, si les échanges moyens d'énergie avec l'espace ne sont pas équilibrés, il y aura un stockage ou un déstockage d'énergie par la Terre. Ce déséquilibre provoque alors un changement de température de l'atmosphère (voir Réchauffement climatique).
L'effet de serre doit son nom à l'analogie entre l'atmosphère terrestre et une serre destinée à abriter des plantes. Les parois vitrées de la serre laissent entrer le rayonnement visible (qui transporte la majeure partie de l'énergie solaire) mais réfléchissent (ne laisse pas échapper) des rayonnements infrarouges, cause importante des pertes thermiques de tout corps (loi du corps noir). Le verre de la serre joue donc un rôle analogue à celui de l'atmosphère, qui contient les gaz à effet de serre.
Les gaz à effet de serre
Les gaz à effet de serre sont des composants gazeux de l'atmosphère qui contribuent à l'effet de serre. Les principaux gaz à effet de serre sont la vapeur d'eau, le dioxyde de carbone (CO2), le méthane (CH4), l'oxyde nitreux (ou protoxyde d'azote, de formule N2O) et l'ozone (O3). Les gaz à effet de serre industriels incluent les halocarbones lourds (fluorocarbones chlorés incluant les CFC, les molécules de HCFC-22 comme le fréon et le perfluorométhane) et l'hexafluorure de soufre (SF6).
Contributions approximatives à l'effet de serre des principaux gaz :
- vapeur d'eau : 55 %
- dioxyde de carbone : 39 %
- ozone : 1 %
- méthane : 1 %
- oxyde nitreux :4 %
Ces gaz ont pour caractéristique commune d'absorber une partie des infra-rouge émis par la surface de la Terre.
Effets des activités humaines
La plupart des gaz à effet de serre (GES) sont d'origine naturelle. Mais certains d'entre eux sont uniquement dus à l'activité humaine ou bien voient leur concentration dans l'atmosphère augmenter en raison de cette activité. C'est le cas en particulier de l'ozone (O3), du dioxyde de carbone (CO2) et du méthane (CH4).
La preuve que l'augmentation du CO2 atmosphérique est d'origine humaine se fait par analyse isotopique.
L'ozone est fourni en grande quantité par l'activité industrielle humaine, alors que les CFC encore largement utilisés détruisent eux, l'ozone, ce qui fait que l'on peut constater un double phénomène :
- une accumulation d'ozone dans la troposphère au-dessus des régions industrielles,
- une destruction de l'ozone dans la stratosphère au-dessus des pôles.
La combustion des carbones fossiles comme le charbon, le lignite, le pétrole ou le gaz naturel (méthane) rejette du CO2 en grande quantité dans l'atmosphère. Si bien que seule la moitié est recyclée par la nature, et que l'autre moitié reste dans l'atmosphère, ce qui augmente l'effet de serre. Un des secteurs d'activités qui dégage le plus de gaz à effet de serre est l'énergie : à ce sujet, voir l'article énergie et effet de serre.
Les activités humaines dégagent donc une abondance de GES : les scientifiques qui étudient le climat pensent que l'augmentation des teneurs en gaz d'origine anthropique est à l'origine d'un réchauffement climatique. Ces gaz à effet de serre fonctionnent donc comme une couverture qui maintient une température chaude à la surface de notre Terre et l'empêchent ainsi de se refroidir.
En France, selon le groupe Facteur 4, les émissions de gaz à effet de serre proviennent des transports pour 26 %, suivis de l’industrie (22 %), de l’agriculture (19 %), des bâtiments et habitations (19 %), de la production et de la transformation de l’énergie (13 %), et du traitement des déchets (3 %). Depuis 1990, les émissions ont augmenté de plus de 20 % pour les transports et les bâtiments. En revanche, elles ont diminué de 22 % dans l’industrie, de 10 % dans le secteur agricole, de 9 % dans le secteur de l’énergie et de 8 % pour le traitement des déchets. (Voir le projet de rapport 2006 du groupe Facteur 4).
Conséquences pour l'environnement
L'effet de serre n'est pas en soi nocif aux écosystèmes ; sans lui, la température terrestre avoisinerait les -18 °C. Cependant un excès de GES dépassant la capacité des écosystèmes à les piéger et les absorber est un danger pour la plupart des espèces dites évoluées.
Un réchauffement global provoquerait d'abord une augmentation mécanique du volume d'eau de mer par dilatation et par la fonte des calottes polaires, qui engloutirait les terres basses (les îles coralliennes comme les îles Maldives sont les premières menacées), mettant en péril de nombreuses espèces dont peut-être, par acidification des océans, le phytoplancton qui produit 80 % du dioxygène que nous respirons et qui absorbe l'essentiel du dioxyde de carbone) dissous dans l'eau de mer (le CO2 est 60 fois plus présent dans la mer que dans l'air (1,8 % au lieu de 0,03 %) pour un volume grossièrement estimé à 1 370 millions de km³. D'autres conséquences sont attendues, dont une augmentation de la pluviométrie, et la modification des courants marins, ce qui modifierait aussi le niveau moyen des mers avec des conséquences potentiellement désastreuses. Des conséquences plus ou moins difficiles à prévoir risquent de provoquer un véritable changement climatique. Un effet « boule de neige » auto entretenu pourrait être amorcé par la fonte du pergélisol avec évaporation d'hydrates de méthane, s'ajoutant à celui qui pourrait aussi être libéré en mer, ainsi que par l'augmentation des incendies de forêts et d'inondations se traduisant par la méthanisation de matière organique immergée, qui sont autant de facteur de réchauffement.
Les scientifiques prévoient une augmentation de 1,5 °C à 6 °C pour le siècle à venir en supposant que l'augmentation des rejets de GES continue au rythme des 20 dernières années (on n'a pas observé de ralentissement global des émissions, même depuis Kyoto). Un arrêt total et immédiat des rejets de carbone n'empêcherait cependant pas la température moyenne de la planète de continuer à augmenter pendant plusieurs dizaines à centaines d'années, car certains GES ne disparaissent de l'atmosphère que très lentement.
Conséquences pour les humains
Le changement climatique ne peut que perturber les activités humaines, plus ou moins directement. Par exemple, après s'être plaints d'avoir de plus en plus chaud en 2006, les Inuit du Grand Nord québécois, ont obtenu une réduction des tarifs d'électricité. En juin, la température ayant atteint 31 °C pendant près d'une semaine, Larry Watt, le bien-nommé maire de Kuujjuak, la capitale du Nunavik, a passé commande d'une dizaine de climatiseurs pour le conseil municipal.
Le réchauffement climatique semble une réalité au nord du 55e parallèle : même si les avis diffèrent d'un spécialiste à l'autre, les modèles prévoient que la température devrait y progresser de quatre à sept degrés d'ici le Modèle:XXIIe siècle et que le niveau des mers des régions polaires devrait augmenter d'un demi-mètre. D'ici seulement 15 ans, certains passages de l'océan Arctique pourraient être navigables quatre ou cinq mois par an au lieu de deux actuellement.
Rétroaction positive et emballement de l'effet de serre
Quand il y a une réaction en chaîne, telle que la concentration d'un gaz à effet de serre augmente avec la température, il y a une rétroaction positive ("positive feedback" en anglais). Un autre exemple de rétroaction positive est la diminution de la couverture de glace qui affaiblit l'albédo de la planète et contribue ainsi à augmenter sa température.
Avec le rayonnement de la Terre qui augmente proportionnellement à la puissance quatrième de la température, l'effet de rétroaction doit être très fort pour provoquer un emballement. Si cela se produit et les réactions ne se terminent qu'après avoir produit une grande augmentation de la température, cela s'appelle un emballement de l'effet de serre ("runaway greenhouse effect" en anglais).
Selon l'hypothèse du fusil à clathrates ("clathrate gun" en anglais) un emballement de l'effet de serre pourrait être causé par la libération de méthane à partir des clathrates (hydrates de méthane qui tapissent le fond des océans) suite au réchauffement planétaire. On suppose que l'extinction massive d'espèces lors du Permien-Trias a été causée par un tel emballement. Il est également estimé que de grandes quantités de méthane pourraient être libérées de la toundra sibérienne qui commence à dégeler, le méthane étant 21 fois plus puissant comme gaz à effet de serre que le dioxyde de carbone.
Vénus a peut-être été le siège d'un emballement de l'effet de serre, ce qui expliquerait les niveaux très élevés de sa température et de sa teneur en CO2.
Histoire de la notion d'effet de serre
Dans les années 1780, Horace-Bénédict de Saussure mesure les effets thermiques du rayonnement solaire à l'aide de boîtes transparentes qu'il dispose dans la vallée et au sommet d'une montagne.
En 1824, Joseph Fourier publie Remarques générales sur les températures du globe terrestre et des espaces planétaires dans lesquelles il affine l'analyse des expériences de Horace-Bénédict de Saussure en concluant « la température du sol est augmentée par l'interposition de l'atmosphère, parce que la chaleur solaire trouve moins d'obstacles pour pénétrer l'air, étant à l'état de lumière, qu'elle n'en trouve pour repasser dans l'air lorsqu'elle est convertie en chaleur obscure ».
La vapeur d'eau et le dioxyde de carbone sont identifiés comme les principaux responsables de cet effet de serre par John Tyndall en 1861. Il suggère alors qu'une modification de la composition de l'atmosphère peut avoir une influence sur l'évolution du climat.
En 1896, Svante August Arrhenius estime qu'un doublement de la quantité de dioxyde de carbone devrait augmenter de 4° la température moyenne. Il espère ainsi que l'exploitation du charbon permettra de repousser la prochaine ère glaciaire. Le géologue américain Thomas Chamberlin arrivera indépendamment aux mêmes conclusions.
L'effet de serre est à l'origine des alertes du rapport Brundtland (1972). En France, Jean-Marc Jancovici et Hervé Le Treut ont vulgarisé les risques liés à l'effet de serre depuis les années 1980.
Débat scientifique sur l'origine et les conséquences de l'effet de serre
Les études concernant le réchauffement climatique et ses conséquences ont été parmi les plus fournies de l'histoire scientifique inter-disciplinaire. Toutefois, les pressions politiques et les conséquences potentielles pour le lobby industriel lié à l'exploitation des énergies fossiles, que l'adoption de quotas d'émissions carboniques menacerait dangereusement, ont favorisé l'émergence et le développement d'un contre-courant scientifique remettant en cause l'interprétation des données.
La nature et la qualité scientifique des contre-expertises apportées contre les théories alarmantes (jugées « alarmistes » par les « sceptiques ») de l'origine anthropique du réchauffement climatique sont sujet à caution pour deux raisons ;
- à cause du financement de ces contre-expertises par des lobbys industriels, chapeautés par Don Pearlman (cf. Carbon Club) lors des accords signés à Kyoto. Par exemple, dans le documentaire vidéo The Greening of the Planet Earth (diffusé en 1988), la Western Fuels Association prévoit que le doublement des émissions de carbone, tel qu'il est en cours, permettrait l'augmentation des surfaces cultivables sur la planète. La Western Fuels Association a également financé le lancement de la World Climate Review, dont le contenu peut difficilement prétendre détenir l'indépendance que réclame l'objectivité scientifique.
- par l'utilisation de données tronquées ou non scientifiquement validées, voire de méthodes jugées par certains scientifiques comme fraude scientifique[2].
Certains scientifiques, tout en reconnaissant les changements induits par la montée des eaux et le besoin de prendre des mesures, rejettent le « catastrophisme » . Certains estiment que des îles coralliennes telles que les Maldives pourraient se surrélerver grâce à la croissance des coraux qui pourrait se faire aussi rapidement que la montée des eaux. D'autres ou les mêmes, se basant sur l'histoire de la Terre, estiment qu'à chaque fois la nature a trouvé les réponses appropriées, et que si des espèces sont ou seront conduites à régresser ou disparaître, d'autres apparaîtront et se développeront selon les principes de la sélection naturelle. D'autres répondent à ces mêmes arguments que ces transformations évolutives ont dans le passé duré des dizaines de millions d'années, alors que le changement climatique envisagé aujourd'hui se produira sur un siècle ou deux, avec une intensité inhabituelle pour un délai si court ; délai biologiquement trop bref pour que la nature puisse s'adapter comme elle l'a fait lors des crises d'extinctions passées.
Le rôle des contrails ou traînées de condensation des avions a fait l'objet d'un rapport (en anglais) de l'IPCC mais doit encore être éclairci et maîtrisé, notamment dans ses liens avec le trou dans la couche d'ozone qui pourrait induire d'importantes rétroactions susceptibles d'accélérer le réchauffement global (via la réduction des capacités naturelles des écosystèmes à absorber et stocker le carbone).
Effet de serre sur Vénus
L'effet de serre, en tant que processus naturel, est également observé sur Vénus où, avec une atmosphère composée à 96% de dioxyde de carbone (CO2), la température atteint plus de 400 °C.
Voir aussi
- Réchauffement climatique
- traînées de condensation
- Écoréfugié
- Bilan carbone
- Séquestration du carbone
- Facteur 4, Facteur 9
Références
Liens externes
- Gouvernement de France
- (fr) Mission interministérielle à l'effet de serre
- (fr) Observatoire National sur les Effets du Réchauffement Climatique
- Gouvernement du Canada
- (fr) Carte sur l'effet de serre par Ressources naturelles Canada
- Autres
- (fr) Réseau Action Climat France
- (en) Realclimate Blog de commentaire des résultats scientifiques récents animé par des scientifiques.
- (en) Émissions européennes par rapport à l'objectif de Kyoto
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