Différences entre versions de « Mécanisme - Atomisme »

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: Tableau:Les entités vues par Boyle
 
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== Cartésiens et atomistes ==
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Il est difficile de cerner la position de Boyle sur la question des atomes. Il existe des textes où il semble prendre le parti des cartésiens, soit qu’il assimile la divisibilité à l’infini de la matière et celle de l’étendue géométrique, soit qu’il souligne la légèreté avec laquelle les atomistes posent des corps indivisibles sans chercher à rendre raison de leur indivisibilité. Il existe d’autres textes où il affirme l’existence de particules qu’aucun pouvoir naturel ne peut réellement diviser, même si elles sont divisibles en pensée ou par Dieu. Son attitude la plus courante consiste à ne se commettre pour aucun parti et à employer indifféremment des termes issus de traditions opposées : quand par exemple il parle des particules, des corpuscules, des minima naturalia ou des prima naturalia qui constituent l’or, il peut se référer soit aux atomes indivisibles qui constituent l’or, soit aux plus petites particules telles que, si on les divisait, on n’aurait plus affaire à de l’or, soit à des agrégats de particules entre lesquels les réactions chimiques auraient lieu. Quoique, à ma connaissance, il n’existe pas de texte où Boyle déclare explicitement que la question des atomes est une question métaphysique, il me semble qu’on peut interpréter de la sorte la neutralité ou l'ambiguïté de son vocabulaire et de ses conceptions.
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-ce n’est pas pour avoir élaboré une théorie de la matière qui transcenderait l’opposition entre gassendistes et cartésiens que Boyle néglige leur différence, mais tout simplement parce qu’il juge que cette différence n’a pas de sens pour un philosophe naturel. Celui-ci devrait se contenter d’expliquer des faits expérimentaux sans se préoccuper des controverses qu’ils ne permettent pas de trancher. Si cependant la possibilité d’expériences constitue le critère permettant d’éliminer de la philosophie naturelle la question de la nature de la matière, la plus grande intelligibilité d’un ensemble de principes n’en constitue pas une défense suffisante. De fait, Boyle reproche aux atomistes antiques d’avoir confondu ce que nous pouvons comprendre et ce que sont réellement les choses : « L[eur] argument fondamental […] est que ou bien le phénomène doit être expliqué de la manière qu’ils indiquent, ou bien il ne peut pas du tout recevoir d’explication intelligible. [Mais…] ce à quoi ils voudraient acculer leurs adversaires comme à une absurdité, semble ne pas mériter ce nom. Car […] qui nous a démontré que l’homme peut expliquer tous les phénomènes de la nature ? […] Comment prouver que Dieu […] ne peut pas produire de phénomènes qui ne sont pas conformes aux procédés que la faible raison de l’homme peut expliquer ? […] Certains Épicuriens déclarent que la nature produit les choses de la manière qui est la plus facile à comprendre pour notre raison et la plus conforme à elle ; mais on peut répliquer que ce que nous cherchons, c’est la manière dont les choses ont été ou sont réellement produites, non si elles ont été produites de la manière qui est la plus aisée à comprendre pour nous »24. Cette critique vaut tout aussi bien à propos des principes mécaniques de Boyle lui-même : il ne pouvait se contenter de dire qu’ils étaient intelligibles, il se devait de les fonder expérimentalement.
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-C’est ce qu’il voulut faire en conciliant les philosophes mécaniques et les chimistes. A l’en croire, le désaccord entre les uns et les autres était extrême : les philosophes mécaniques regardaient les chimistes comme de « simples manipulateurs irrationnels dont les expériences ne servent qu’aux apothicaires et aux médecins », les chimistes considéraient les philosophes mécaniques comme de « vains spéculateurs extravagants qui prétendent expliquer le grand livre de la nature sans avoir seulement regardé […] les phénomènes ». Les uns et les autres auraient cependant tout à gagner d’une fréquentation mutuelle : les expériences des chimistes seraient fructueuses pour la philosophie naturelle ; les chimistes auraient à prendre une leçon d’intelligibilité auprès des philosophes mécaniques26. Aussi Boyle se proposait-il de réconcilier les deux camps en montrant que « quantité d’expériences chimiques peuvent être heureusement expliquées par des notions corpusculaires et que quantité de notions corpusculaires peuvent être commodément, soit illustrées, soit confirmées par des expériences chimiques ».
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== Philosophes mécaniques et expérimentateur ==
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L’illustration ou la confirmation de la philosophie mécanique par des expériences chimiques ne va pas de soi : les réactions chimiques ont lieu entre des corps concrets doués de qualités sensibles qui n’ont au premier abord rien à voir avec des mouvements de particules microscopiques. Ainsi, lorsque Boyle réalisa la décomposition du salpêtre en un acide et un alcali, Spinoza lui reprocha de décrire ces composants en termes chimiques sans chercher à en rendre compte mécaniquement. Le problème n’est d’ailleurs pas seulement celui de l’accord entre la philosophie mécanique et la pratique chimique, mais plus généralement celui de l’accord entre la philosophie mécanique et toute pratique expérimentale dont la description implique des termes non-mécaniques. Lorsque Boyle montra que l’air a un certain « ressort », c’est-à-dire qu’il est capable de revenir dans son état naturel après avoir été comprimé, Hobbes souligna l’obscurité d’une telle capacité : il n’existe en bonne philosophie mécanique ni mouvement spontané ni état naturel des corps. Sans cesse confronté à ce problème général, Boyle choisit d’autoriser l’utilisation provisoire de causes non-mécaniques qu’il appelle des « qualités ou des états corporels plus évidents et familiers », des « théories, notions et règles intermédiaires», des « principes subordonnés », des « causes subordonnées », des « qualités plus générales et familières » ou des « causes intermédiaires »
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Dans Some Considerations touching Experimental Essays in General, il défend le recours provisoire à des causes non-mécaniques de la manière suivante. Il commence par définir l’explication scientifique : « rendre raison d’un effet ou d’un phénomène, c’est en général le déduire de quelque chose d’autre dans la nature, plus connu que lui » et remarque conséquemment qu’il y a divers degrés dans l’explication d’un même phénomène. Or, « quoique les explications les plus satisfaisantes pour l’entendement soient celles où l’on montre comment l’effet est produit par les affections de la matière les plus primitives et les plus universelles, à savoir la masse, la forme et le mouvement, il ne faut pas mépriser les explications où les effets particuliers sont déduits de qualités ou d’états corporels plus évidents et familiers comme le chaud, le froid, le poids, la fluidité, la dureté, la fermentation, etc., même s’ils dépendent probablement à leur tour des trois principes universels nommés à l’instant. […] Si nous connaissons les qualités de tel ou tel corps et comment il est propre à agir sur d’autres corps, […] nous pouvons réussir des choses de grande importance sans avoir à remonter jusqu’en haut la série des causes »
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'''Exemple:'''Savoir que l’or est le seul corps à avoir une plus grande densité que le mercure permet d’expliquer que tous les corps flottent dans le mercure à l’exception de l’or, quand bien même on ne sait pas expliquer mécaniquement la gravité ; de même, savoir que l’air a un ressort permet d’expliquer qu’une vessie gonflée d’air revienne à sa forme première après avoir été comprimée quand bien même on ne sait pas ce qu’est ce ressort.
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==> Boyle suggère dès lors de répartir le travail
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les esprits spéculatifs déduiront des « qualités premières universelles » (c’est-à-dire grandeur, figure et mouvement) les « qualités principales de la matière » (par exemple la fluidité, la dureté, etc.) ; les expérimentateurs chercheront les causes immédiates de phénomènes.
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Version du 13 juillet 2020 à 21:57


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