Pragmatisme
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Conception : Clarification - Explicitation
- Étymologie : du grec "pragmatikos", qui concerne l'action de "pragma", action, affaire.
Dans le langage courant, le pragmatisme est l'attitude d'une personne qui s'adapte à la réalité et qui préfère l'action pratique. En politique, le pragmatisme est une attitude fondée sur le réalisme et qui privilégie l'observation des faits. Le pragmatisme est une doctrine ou un mode de pensée selon lequel la réussite pratique est le seul critère de vérité. C'est une forme d'empirisme qui valorise l'action, l'efficacité, l'expérience, la mise en pratique et ce qui fonctionne réellement plutôt que des considérations abstraites ou théoriques. Une idée ou une théorie ne peut être considérée comme vraie que si elle peut agir sur le réel. Le pragmatisme s'est développé, sous forme d'une théorie philosophique, aux Etats-Unis à la fin du XIXe siècle, avec Charles Sanders Peirce, William James et John Dewey. Pour eux, une pensée n'a de sens que par ses implications concrètes et les idées ne sont que des instruments de la pensée. La vérité n'existe pas a priori, mais se révèle progressivement par l'expérience.
Le pragmatisme est un courant de pensée philosophique d’origine américaine qui possède, aujourd’hui encore, de nombreuses ramifications disciplinaires. Les pragmatistes entendent éclairer tous les aspects de l’expérience humaine en les considérant du point de vue d’un organisme intelligent en prise avec un environnement complexe et changeant. Être pragmatique, ce n’est donc pas vouloir se passer de théories, mais c’est fixer le sens et la valeur de ces théories en fonction des actions, conduites, pratiques, choses à faire (pragmata) qui en découlent. Un tel point de vue engage souvent un travail acéré de critique des faux-problèmes posés par une compréhension abstraite de nos productions théoriques ou plus largement intellectuelles.
En même temps, les pragmatistes cherchent à résister au besoin démesuré de certitude qui nous pousse à chercher des fondements absolus à nos pratiques – qu’elles soient scientifiques, morales, politiques, esthétiques –, comme si elles devaient présupposer une instance (un Dieu, un principe supérieur, une réalité ultime, une valeur suprême) qui les garantisse une fois pour toutes. L’absence de tels fondements n’est en rien un manque, mais au contraire l’invitation à chercher à améliorer constamment ces pratiques et à en expérimenter de nouvelles. Les pragmatistes sont influencés par la révolution darwinienne (pas d’espèce fixe, pas de plan de développement de la vie), désireux de retrouver l’esprit expérimental des sciences (pas d’idée si acceptée soit-elle qui ne puisse être révisée au cours des expériences futures) et fervents défenseurs d’une démocratie pluraliste (pas de blocage au processus de réforme permettant à une population d’agir sur ses propres conditions de vie). Le pragmatisme renvoie ainsi dos-à-dos les deux tentations jumelles de l’aspiration métaphysique à des fondements permanents et de l’acceptation relativiste de la perte de tout repère.
Entendant dépasser le dualisme de la théorie et de la pratique, son but est à la fois de rendre nos idées plus concrètes et de rendre nos actions plus intelligentes.
Historiquement, le pragmatisme naît aux États-Unis à la fin du XIXe siècle de la recherche d’une méthode pour rendre les idées claires et s’étend rapidement dans les premières décennies du XXe siècle à tous les champs philosophiques selon des déclinaisons personnelles (« pragmaticisme » de Charles S. Peirce, « empirisme radical » de William James, « humanisme » de Ferdinand S. Schiller, « instrumentalisme » de John Dewey). Son développement se fait en échange constant avec les sciences (logique, mathématiques et sémiotique chez Peirce, psychologie biologique de James, psychologie sociale de George H. Mead, sociologie de la tradition de Chicago, linguistique de Charles Morris) mais aussi en relation étroite avec les initiatives visant à faire progresser la démocratie sociale (écoles Dewey, centre pour les immigrants de Jane Addams, lutte de W. E. B. Du Bois contre le racisme et pour les droits civiques, etc.). Après une période de reflux dû notamment à la montée du positivisme logique en philosophie et au climat politique du maccarthysme, le pragmatisme connaît un nouvel essor à partir des années 1970 à la fois par la formation de courants néo-pragmatistes (Richard Rorty, Hilary Putnam) et par le travail d’édition et de commentaire des pragmatistes classiques (Richard Bernstein, John J. McDermott, Max F. Fisch, etc.). Il s’illustre aujourd’hui chez des auteurs aussi différents que Joseph Margolis, Robert Brandom ou Richard Shusterman.
Le pragmatisme de Richard Rorty: Le pragmatisme, qui s'est vu consacré aux États-Unis comme le courant dominant avant la Deuxième Guerre mondiale, a subi une longue éclipse à cause de la domination du style analytique, mais connaît un renouveau, surtout à travers l'œuvre de Richard Rorty (né en 1931). Rorty, issu du courant analytique, mais extrêmement original et fortement critiqué pour ses vues sur la fin de la philosophie et pour son prétendu relativisme, se considère essentiellement comme un disciple de Dewey, mais trouve aussi son inspiration chez des grands noms de la "philosophie continentale", comme Hegel, Nietzsche, Heidegger, Foucault ou Derrida.
Le pragmatisme en France: Le pragmatisme fut l'objet de débats en France, par exemple chez Émile Durkheim, extrêmement critique à son égard, et chez Henri Bergson, dont l'article sur «Le Pragmatisme de William James» (dans "la Pensée et le mouvant") y voit un mode de pensée proche de sa propre doctrine de la science comme caractéristique de l'homo faber. Le constructivisme épistémologique, du Jean Piaget ou du Jean-Louis Le Moigne, s'inspire clairement du pragmatisme. Un courant de sociologie pragmatique s'est développé en France depuis le milieu des années 1980, avec des auteurs particulièrement différents comme Luc Boltanski, Francis Chateauraynaud, Alain Desrosières, Antoine Hennion, Bruno Latour, Cyril Lemieux, Laurent Thévenot, mais ces auteurs manifestent une distance vis-à-vis du pragmatisme au sens philosophique.
Au total, le pragmatisme apparaît comme une philosophie particulièrement sulfureuse, du fait de sa profonde remise en cause d'habitus beaucoup inconscients qui furent essentiels à la philosophie au cours de très nombreux siècles. Elle interroge surtout la signification même de l'activité philosophique, autant que son rôle dans la culture généralement.
Conceptions erronées et origines possibles
- Un pragmatique, pour l’usage populaire, c’est quelqu’un qui ne s’empêtre pas dans les considérations formelles, les procédures et les manières de faire ; lui importe avant tout d’être efficace. Il est clair qu’il y a confusion si nous prenons le pragmatisme philosophique dans ce sens-là, car ce n’est pas de cela qu’il s’agit. Pour quelqu’un comme Peirce, le pragmatisme (qu’il renommera un peu plus tard le pragmaticisme, pour le distinguer de certains usages critiquables du terme qu’il a lui-même lancé) désigne avant tout une théorie du sens ou de la signification. Selon cette théorie, le sens d’un concept se comprend entièrement et seulement par les effets que le concept ou la théorie de la chose permet d’escompter à propos de cette chose.
- Avec le pragmatisme, les fins peuvent être tenues pour acquises.
- Le pragmatisme ne peut pas être une philosophie de la communication et des interactions et ne permet pas de renouveler la conception et le travail de l’éthique environnementale.
- Le pragmatisme est privilégié dans le contexte du développement durable.
- L'éthique environnemental n'a aucune relation avec le pragmatisme dans le cas du développement durable.
Conceptions: Origines possibles
- En Europe continentale, le pragmatisme a connu une forte réception au début du XXe siècle, notamment en France et en Italie, avant de s’effacer devant la montée de la phénoménologie, de l’existentialisme, du marxisme puis du structuralisme. Sa réappropriation, également à partir des années 1970, s’est d’abord faite en Allemagne à travers les travaux de Karl Otto Apel et de Jürgen Habermas, ainsi que Hans Joas. L’une des spécificités de son renouveau actuel en France est qu’il est le fait à la fois de philosophes et de chercheurs en sciences sociales.
- Le pragmatisme philosophique a inspiré un nouveau courant depuis quelque temps, appelé tout simplement en anglais "Environmental pragmatism" : voir en particulier le collectif qui porte ce titre et les travaux de Minteer et Manning. Vouloir tout bonnement rendre compte ici de ces travaux riches et utiles ne suffirait pas pleinement, surtout pour le lecteur francophone parfois encore peu avisé de la tradition du pragmatisme. Encore faut-il en effet saisir certains éléments centraux de l’approche que constitue le pragmatisme avant même de pouvoir entrer dans certains débats techniques. Ce que nous tenterons de faire dans les pages qui viennent pour voir ensuite comment une telle approche permet peut-être de voir autrement la question de l’éthique environnementale, et ce, dans une perspective d’éthique appliquée.
Liste des principaux philosophes pragmatistes
- Précurseurs
- Jean Duns Scot.
- Guillaume d'Ockham.
- John Locke.
- George Berkeley.
- David Hume.
- XIXe siècle
- C. S. Peirce.
- William James.
- John Dewey.
- XXe siècle
- John L. Austin.
- Hilary Putnam.
- Richard Rorty.
Conceptions liées - Typologie
Épistémologie / Courant de pensée / Philosophie / Histoire des sciences / Empirisme / Réalisme / Scepticisme / Darwinisme / Pensée écologique / Relativisme / Pragmaticisme / Empirisme radical / Humanisme / Instrumentalisme / Positivisme / Maccarthysme / Néo-pragmatisme / Anthropocentrisme / Dualisme individu/société /
Concepts ou notions associés
Doctrine / Attitude / Langage / Mode de pensée / Pratique / Vérité / Action / Efficacité / Théorie / Réel / Instruments / Pensée / Développement durable / Ethique environnementale / Bioéthique / Intérêt /
Références
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Éléments graphique
Stratégie de changement conceptuel
- Aborder les courants de pensée en concordance avec le pragmatisme pour bien l'expliquer:
- Réalisme,humanisme, instrumentalisme, conceptualisme, empirisme...
- Aborder les courants de pensée qui sont en discordance avec pragmatisme:
- L'idéalisme, la théorie spectatoriale de la connaissance...
- Aborder le pragmatisme environnemental:
- Son rôle dans le contexte d'un développement durable.
- Sa valeur par rapport à l'approche écologique.
Exemples de stratégie:
- Commencer par une activité ou sont comparés le pragmatisme, le réalisme et l'empirisme afin de bien distinguer les points communs et les différences.
- Réaliser ensuite une activité ou sont comparés le pragmatisme, L'idéalisme, la théorie spectatoriale de la connaissance pour bien voire les discordances entre ces courants de pensé et leurs interaction en histoire des sciences.
- Réaliser une activité ou sont comparés: le pragmatisme et l'approche écologique dans le cadre de Développement Durable.
L’exemple du développement durable : Pour une éthique de l’environnement inspirée par le pragmatisme
Il s’agit ici de montrer de quelle manière le pragmatisme, à la lumière des fondateurs du pragmatisme que sont Charles S. Peirce, William James et John Dewey, permet de renouveler la conception et le travail de l’éthique environnementale. Dans ce but, nous rappelons les grandes questions qui ont accompagné le développement de l’éthique dite de l’environnement depuis ses débuts, mais en regardant plus précisément les débats qui ont agité les dernières décennies. Nous montrons aussi quels autres types de réflexion ont été développés dans le chantier de l’éthique de société, en particulier dans le secteur de l’éthique biomédicale et celui de l’éthique appliquée. Ici nous nous situons explicitement dans le contexte des travaux d’une telle éthique appliquée, comprise autrement que comme un principisme appliqué (voir Beauchamp et Childress, 2008). Nous rappelons aussi quelques grandes caractéristiques du pragmatisme en général et sur les questions d’éthique, ceci dans le but de montrer la spécificité de l’approche du pragmatisme. Pour mieux faire voir quelles conséquences cette perspective apporte sur les questions qui nous intéressent, nous terminons en prenant l’exemple du développement durable.
Questions possibles
- Qu'est ce que le pragmatisme?
- A quoi s'oppose le pragmatisme?
- Peut-on parler d'une complémentarité entre la pensée ecologique et le pragmatisme dans le thème "Développement Durable"?
- Quelles sont les limites du pragmatisme dans le thème "Développement Durable"?
- Exemple de l'impact du pragmatisme dans le thème "Développement Durable"?
Bibliographie
Pour citer cette page: ([1])
ABROUGUI, M & al, 2020. Pragmatisme. In Didaquest [en ligne]. <http:www.didaquest.org/wiki/Pragmatisme>, consulté le 22, décembre, 2024
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